09 octobre 2015
Comme si
Comme si rien n'était, comme si de rien n'était.
- C'est une chose de peut-être vouloir tuer, c'en est une autre de se préoccuper de sourire comme si rien n'était.
(Mylène Moisan, dans Le Soleil du 2 octobre 2015.)
On dit comme si rien n'était arrivé, mais comme si de rien n'était, locution adverbiale qui signifie, selon le Petit Robert, « en agissant comme si rien ne s'était passé; en affectant l'innocence, l'indifférence, l'oubli » :
Peu après, toute la famille se mettait à table comme si de rien n'était. (P. Besson dans le Petit Robert, à l'article « rien ».)
Il fallait écrire :
C'est une chose de peut-être vouloir tuer, c'en est une autre de se préoccuper de sourire comme si de rien n'était.
La faute semble fréquente; on peut trouver une mise en garde dans le Hanse-Blampain (j'ai la quatrième édition), à l'article « rien ».
Line Gingras
Traductrice agréée (OTTIAQ, ATIO)
Réviseure pigiste
Québec
« L'obsession » : http://www.lapresse.ca/le-soleil/actualites/chroniques/my...
Il n'y a pas que ce que l'on dit; la manière dont on le dit, c'est un message aussi.
02:36 Publié dans Cultiver le doute, On ne se relit jamais trop, Questions de langue | Lien permanent | Tags : langue française, journalisme, presse, médias
08 octobre 2015
La réintégration de la victime à son dédommagement?
- C’est plus rapide, c’est gratuit et l’accent est mis sur la médiation, c’est-à-dire sur la réintégration de la victime dans son milieu de travail et/ou à son dédommagement.
(Francine Pelletier, dans Le Devoir du 7 octobre 2015.)
L'accent est mis sur la réintégration de la victime dans son milieu de travail et/ou à son dédommagement? L'accent est mis sur la réintégration de la victime à son dédommagement? La phrase serait plus claire si l'on avait employé la bonne préposition :
C’est plus rapide, c’est gratuit et l’accent est mis sur la médiation, c’est-à-dire sur la réintégration de la victime dans son milieu de travail et/ou sur son dédommagement.
Line Gingras
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« Pratiques culturelles barbares » : http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/451...
Il n'y a pas que ce que l'on dit; la manière dont on le dit, c'est un message aussi.
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07 octobre 2015
Ravisseurs, otages...
- Le premier ministre tint bon. En dépit de l’appui surprenant d’une quinzaine de personnalités québécoises à l’idée d’échanger les ravisseurs contre la vingtaine de prisonniers politiques détenus depuis quelques mois ou quelques années.
(Claude Trudel, chef de cabinet adjoint de Robert Bourassa de 1970 à 1975 – donc pendant la crise d'Octobre – dans Le Devoir du 7 octobre 2015.)
Ce ne seraient pas plutôt les otages que l'on proposait d'échanger?
Line Gingras
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« La crise d’Octobre, 45 ans déjà » : http://www.ledevoir.com/politique/quebec/451865/la-crise-...
Il n'y a pas que ce que l'on dit; la manière dont on le dit, c'est un message aussi.
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06 octobre 2015
Se succéder sur le conseil d'administration
Être sur un comité, être sur un conseil; siéger sur un comité, siéger sur un conseil; se succéder sur un comité, se succéder sur un conseil; emploi des prépositions; grammaire française; syntaxe du français; anglicisme; calque de l'anglais.
- [...] mais se sont succédé sur son conseil d’administration des personnalités politiques aussi importantes que [...]
(Christian Rioux, dans Le Devoir du 3 octobre 2015.)
Les constructions du genre être sur un comité ou siéger sur un conseil sont des calques de l'anglais; on peut voir à ce sujet, entre autres, le Multidictionnaire et la Banque de dépannage linguistique. Il faut dire plutôt, par exemple, siéger à un conseil, faire partie d'un conseil, être membre d'un comité, être à un comité. (J'ai déjà abordé la question ici.)
De même, j'emploierais la préposition à dans le passage à l'étude :
[...] mais se sont succédé à son conseil d’administration des personnalités politiques aussi importantes que [...]
Line Gingras
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« L'Allemagne égratignée » : http://www.ledevoir.com/international/europe/451647/de-vo...
Il n'y a pas que ce que l'on dit; la manière dont on le dit, c'est un message aussi.
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05 octobre 2015
Rendre possible des enquêtes
- Pensez à la création de cette brigade qui serait créée à la Commission des droits de la personne pour recevoir et analyser les dénonciations anonymes avant même la diffusion d’un prétendu discours.
(Antoine Robitaille, dans Le Devoir du 24 septembre 2015.)
Pensez à la création de cette brigade qui serait formée [ou constituée] à la Commission des droits de la personne pour recevoir et analyser les dénonciations anonymes avant même la diffusion d’un prétendu discours [haineux].
- La pente est glissante. Tellement qu’un député libéral, Sébastien Proulx, est allé en commission jusqu’à lancer l’idée de rendre possible des enquêtes sur les « conversations privées »!
Il s'agirait de rendre des enquêtes possibles; l'attribut du complément d'objet direct doit s'accorder avec ce complément :
La pente est glissante. Tellement qu’un député libéral, Sébastien Proulx, est allé en commission jusqu’à lancer l’idée de rendre possibles des enquêtes sur les « conversations privées »!
Line Gingras
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« 59 problèmes » : http://www.ledevoir.com/societe/justice/450828/le-monde-d...
Il n'y a pas que ce que l'on dit; la manière dont on le dit, c'est un message aussi.
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04 octobre 2015
Préoccupé à passer ses lignes
Préoccupé à ou de + infinitif; préoccupé à faire quelque chose, préoccupé de faire quelque chose; grammaire française; syntaxe du français.
- [...] a lancé M. Trudeau devant un Stephen Harper impassible, plus préoccupé à passer ses lignes en anglais et en français qu'à débattre avec ses deux rivaux.
(Vincent Marissal, dans La Presse du 2 octobre 2015.)
D'après le Petit Robert, le Grand Robert et le Trésor de la langue française informatisé, on est préoccupé de faire quelque chose :
Il lésinait misérablement, préoccupé sans cesse de ne pas gâcher de la toile, ni d'employer trop de couleurs. (Gide dans le Grand Robert, à l'article « lésiner ».)
Une coterie beaucoup plus préoccupée de faire prévaloir ses idées et surtout ses intérêts, que de sauvegarder les intérêts de tous. (Viollet-le-Duc, dans le Trésor.)
Elles semblaient surtout préoccupées d'échapper à la médiocrité de la province. (Vailland, dans le Trésor.)
Un cuistre imbécile et hypocrite, uniquement préoccupé de sauver son gagne-pain et de plaire à son maître. (Guéhenno dans le Trésor, à l'article « cuistre ».)
Un jeune homme plus souple, plus habile, plus préoccupé de se gagner la bonne opinion de son milieu social [...] (Larbaud dans le Trésor, à l'article « gagner ».)
Il fallait écrire :
[...] a lancé M. Trudeau devant un Stephen Harper impassible, plus préoccupé de passer ses lignes en anglais et en français que de débattre avec ses deux rivaux.
Line Gingras
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« Justin Trudeau, victoire aux points » : http://www.lapresse.ca/debats/chroniques/vincent-marissal...
Il n'y a pas que ce que l'on dit; la manière dont on le dit, c'est un message aussi.
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03 octobre 2015
Il l'a ruée de coups
Ruer de coups, rouer de coups; paronymes.
- Caroline a raconté que, un peu après minuit le 8 juin 2014, après son quart de travail au CHUL, un homme cagoulé l'a ruée de coups à la tête.
(Mylène Moisan, dans Le Soleil du 2 octobre 2015.)
On doit éviter de confondre ruer et rouer. Que peut-on lire dans le Petit Robert? Se ruer, c'est « [s]e jeter avec violence, impétuosité » :
Il se ruait sur sa femme pour la faire taire. (Zola.)
Une horrible frayeur la saisit et, sans savoir comment, à peu près comme si elle eût été jetée dans le noir par une force irrésistible, elle se rua vers l'escalier […] (J. Green dans le Grand Robert, à l'article « frayeur ».)
Rouer quelqu'un de coups, c'est « le battre violemment » :
Dans ses accès de colère, je l'ai vu rouer sa négresse de coups de cravache, la jeter par terre, la trépigner. (A. Daudet dans le Grand Robert, à l'article « accès ».)
Il fallait écrire :
Caroline a raconté que, un peu après minuit le 8 juin 2014, après son quart de travail au CHUL, un homme cagoulé l'a rouée de coups à la tête.
La faute n'est pas rare, d'après ce qu'indique une recherche Google; on la trouve notamment dans une fiche de TERMIUM Plus.
Line Gingras
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Il n'y a pas que ce que l'on dit; la manière dont on le dit, c'est un message aussi.
01:05 Publié dans Cultiver le doute, On ne se relit jamais trop, Questions de langue | Lien permanent | Tags : langue française, journalisme, presse, médias
02 octobre 2015
Quand « je » est une femme
- Ce débat a donné à M. Duceppe une visibilité qui lui fait défaut dans cette campagne, mais pour assurer la pérennité du Bloc, il devait assez briller pour ramener au bercail des milliers d’électeurs qui ont préféré le NPD au Bloc en 2011. Je ne suis pas sûr qu’il y soit arrivé.
(Manon Cornellier, dans Le Devoir du 25 septembre 2015.)
L'adjectif attribut du sujet doit s'accorder au féminin, « je » désignant madame Cornellier :
Je ne suis pas sûre qu'il y soit arrivé.
- M. Harper a été écorché, mais a été fidèle à lui-même et joué les cartes qui le servent bien dans les régions qu’il cible : budget équilibré, baisses d’impôt, sécurité, niqab.
M. Harper n'a pas été joué, il a joué des cartes; le verbe jouer n'est pas employé avec l'auxiliaire être, comme le verbe écorcher à la forme passive, mais avec l'auxiliaire avoir, qu'il faut donc exprimer :
M. Harper a été écorché, mais a été fidèle à lui-même et a joué les cartes qui le servent bien dans les régions qu’il cible : budget équilibré, baisses d’impôt, sécurité, niqab.
Line Gingras
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« Débattre pour sauver sa peau » : http://www.ledevoir.com/politique/canada/451043/debattre-...
Il n'y a pas que ce que l'on dit; la manière dont on le dit, c'est un message aussi.
02:59 Publié dans On ne se relit jamais trop, Questions de langue | Lien permanent | Tags : langue française, journalisme, presse, médias
01 octobre 2015
Damné pion
Damner le pion ou damer le pion; usage.
- [...] pour mieux damner le pion aux néodémocrates.
(Francine Pelletier, dans Le Devoir du 30 septembre 2015.)
La chroniqueuse voulait certainement dire damer le pion; le Petit Robert nous apprend que damer le pion à quelqu'un, c'est « l'emporter sur lui, le surpasser, répondre victorieusement à ses attaques ». Cette locution figurée est empruntée aux jeux d'échecs et de dames. Il fallait écrire :
[...] pour mieux damer le pion aux néodémocrates.
C'est la deuxième fois que je relève cette faute chez madame Pelletier.
Line Gingras
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Québec
« Niqab, quand tu nous tiens » : http://www.ledevoir.com/politique/canada/451286/niqab-qua...
Il n'y a pas que ce que l'on dit; la manière dont on le dit, c'est un message aussi.
05:14 Publié dans Cultiver le doute, Questions de langue | Lien permanent | Tags : langue française, journalisme, presse, médias