15 avril 2007
Autant que faire ce peut
« Autant que faire ce peut, les cégeps et les universités devraient également aider les étudiants à se diriger dans les secteurs où les besoins sont les plus grands. » (Éric Desrosiers.)
On en trouve confirmation dans le Petit Robert (à l'article « pouvoir »), le Multidictionnaire (à l'article « faire ») et le Hanse-Blampain (à l'article « autant »), l'expression soulignée s'écrit autant que faire se peut : il s'agit du pronominal impersonnel il se peut - autant qu'il se peut faire.
Line Gingras
Québec
« Au diable la dette, place à l'innovation » : http://www.ledevoir.com/2007/04/13/139273.html?fe=760&...
23:55 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, orthographe, journalisme
14 avril 2007
Résulter en
« Leur objectif, voire leur ambition première, est de poser une série de gestes pouvant résulter en une réduction des troupes anglo-américaines disséminées au Moyen-Orient. » (Serge Truffaut.)
D'après ce que je vois dans les dictionnaires généraux, résulter ne veut pas dire « avoir pour conséquence », « avoir pour effet », « avoir pour résultat », mais être la conséquence, l'effet, le résultat de quelque chose. Ce verbe a donc pour sujet ou bien le résultat dont il s'agit, ou bien le pronom impersonnel il :
Cet échec résulte d'une insuffisance d'étude et d'exercices. (Multidictionnaire.)
Son état de santé résulte d'un excès de travail. (Lexis.)
L'amitié résulte d'un faible degré d'opposition entre des êtres individuellement divers. (Senancour, dans le Petit Robert.)
La vision réaliste de Manet n'a jamais admis la poétisation volontaire, hormis celle qui résulte des couleurs elles-mêmes. (Mauclair, dans le Trésor de la langue française informatisé.)
Que résulterait-il de toutes ces démarches? (Lexis.)
Il ne peut rien en résulter de bon. (Petit Robert.)
Il en est résulté des rixes autour des urnes. (Giraudoux, dans le Hanse-Blampain.)
Trois des quatre ouvrages québécois que j'ai consultés, soit le Multidictionnaire, le Chouinard et le Colpron (le Dagenais n'aborde pas la question), signalent comme incorrecte la construction résulter en, calque de l'anglais to result in :
Sa déclaration a provoqué (et non *a résulté en) une abondante correspondance. (Multidictionnaire.)
Divers équivalents sont possibles selon le contexte, par exemple causer, entraîner, produire, se solder par. On trouvera d'excellentes suggestions dans le Meertens.
Le passage à l'étude aurait pu se lire :
... poser une série de gestes pouvant entraîner une réduction des troupes...
Line Gingras
Québec
« Un coup de dés » : http://www.ledevoir.com/2007/04/10/138844.html
00:30 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, anglicisme, journalisme
13 avril 2007
Se féliciter que + indicatif
« Tony Clement était pourtant fier de défendre ses résultats, se félicitant qu'à l'échelle du pays l'ensemble des cinq secteurs prioritaires sont couverts. » (Hélène Buzzetti.)
D'après le Multidictionnaire et le Hanse-Blampain, on peut se féliciter d'avoir fait quelque chose :
Tu te félicites d'avoir pris ton parapluie, car il pleut à torrents. (Multidictionnaire.)
Félicitez-vous d'avoir été épargné. (Lexis.)
Babeuf se félicite d'avoir défendu la révolution et la république. (Jaurès, dans le Trésor de la langue française informatisé.)
Je trouve aussi, dans le Lexis et le Trésor, la construction se féliciter que + subjonctif :
Le père se félicitait que le bachot eût éloigné son cadet de Sérianne. (Aragon, dans le Trésor.)
Il se félicitait que le diable portât pierre à l'édifice chrétien de Claquebue. (Aymé, dans le Lexis.)
Aucun des dix ouvrages consultés ne reçoit se féliciter que suivi d'un indicatif. À mon avis, comme se féliciter exprime un sentiment, le subjonctif est le mode qui convient dans la phrase à l'étude :
Tony Clement était pourtant fier de défendre ses résultats, se félicitant qu'à l'échelle du pays l'ensemble des cinq secteurs prioritaires soient couverts.
Line Gingras
Québec
« Harper tient une promesse... diluée » : http://www.ledevoir.com/2007/04/05/138332.html
02:56 | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, journalisme
12 avril 2007
Une témoin à la mémoire vascillante
« Une témoin à la mémoire vascillante » (titre d'un article de Brian Myles).
À cinq reprises dans le corps de son article, monsieur Myles emploie le nom témoin - chaque fois en parlant d'une femme, et chaque fois au masculin. Il aurait fallu en tenir compte dans l'établissement du titre, d'autant plus que témoin, d'après le Petit Robert (2007), le Hanse-Blampain et même le Multidictionnaire (quatrième édition), est seulement de genre masculin :
Cette femme a été le témoin de la défense. (Hanse-Blampain.)
Elle a été le témoin involontaire de cette scène. (Multidictionnaire.)
« La veille, le témoin C-17 avait déclaré que Désiré Munyaneza l'avait violée à quatre reprises au cours du génocide... »
L'accord par syllepse, c'est-à-dire selon le sens, a paru préférable, ici, à l'accord grammatical. Il crée cependant un certain malaise, ce qu'on aurait pu éviter en remplaçant le témoin C-17 par un terme féminin désignant la même personne : le journaliste utilise déjà survivante (du génocide rwandais) et jeune femme...
Line Gingras
Québec
« Procès pour crime de guerre, crime contre l'humanité et génocide - Une témoin à la mémoire vascillante » [sic] : http://www.ledevoir.com/2007/04/12/139105.html
04:45 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, orthographe, journalisme
11 avril 2007
Au ban des accusés
« Le charabia mis au ban des accusés s'est finalement révélé composer une infime portion de l'ensemble de leurs échanges... » (Frédérique Doyon; il est question d'une étude sur le clavardage.)
D'après le Lexis, mettre quelqu'un au ban (d'un groupe social), c'est « l'en déclarer indigne, le dénoncer comme méprisable aux yeux de ce groupe » :
Mettre une personne (ou un groupe social) au ban de l'opinion, de l'humanité. (Trésor de la langue française informatisé.)
... ils sont mis au ban de la société, froidement méprisés et traités avec hauteur par ceux qui les emploient... (J. Cuisinier, dans le Trésor.)
Robert n'avait-il pas failli se faire mettre au ban de son monde. (Proust, dans le Lexis.)
Mettre un pays au ban des nations. (Petit Robert.)
Par conséquent, mettre quelqu'un - ou quelque chose que l'on personnifie - au ban des accusés, ce serait le déclarer indigne de figurer au nombre des accusés, trop méprisable pour compter parmi les accusés. De toute évidence, on a plutôt voulu dire :
Le charabia mis au banc des accusés s'est finalement révélé composer une infime portion de l'ensemble de leurs échanges...
Line Gingras
Québec
« Le clavardage, massacre de la langue ou renaissance linguistique? » : http://www.ledevoir.com/2007/02/01/129491.html
02:20 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, orthographe, journalisme, presse
10 avril 2007
Sensé ou censé?
« Les grandes entreprises sont sensées accorder une part de leur budget à la formation. » (Victor-Lévy Beaulieu.)
On confond souvent les homonymes sensé et censé. D'après Marie-Éva de Villers, sensé veut dire « qui est plein de bon sens, raisonnable »; et censé, ou bien « réputé, présumé », ou bien « qui doit faire quelque chose, en principe » :
Sensé
Une décision sensée. (Multidictionnaire.)
Un homme, un projet sensé. (Hanse-Blampain.)
Des paroles sensées. (Petit Robert.)
Censé
Ils sont censés venir demain. (Multidictionnaire.)
Il est censé être en voyage. (Hanse-Blampain.)
Elle n'est pas censée le savoir. (Petit Robert.)
Nul n'est censé ignorer la loi.
Dans la phrase à l'étude, il fallait donc écrire :
Les grandes entreprises sont censées accorder une part de leur budget à la formation.
Line Gingras
Québec
« Sur le gaspillage » : http://www.ledevoir.com/2007/04/10/138838.html?fe=730&...
15:50 Publié dans Cultiver le doute | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, orthographe, presse, médias
09 avril 2007
Les éléments modulants l'acoustique
« Lorsqu'on lui demande si la simplicité des éléments modulants l'acoustique à Québec est une réponse à la surenchère des gadgets acoustiques d'autres salles... » (Christophe Huss.)
Modulants serait correctement accordé s'il était adjectif verbal; mais c'est un participe présent, comme le montre la présence d'un complément d'objet direct, l'acoustique. Il doit par conséquent demeurer invariable.
Vous en doutez? Remplaçons éléments par un nom féminin, qui obligerait à prononcer modulantes, si nous avions affaire à un adjectif : dirait-on les parties modulantes l'acoustique, les composantes modulantes l'acoustique?
C.Q.F.D.
Line Gingras
Québec
« Musique classique - Dans les coulisses d'une nouvelle salle de concert » : http://www.ledevoir.com/2007/03/31/137650.html
00:26 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, orthographe, journalisme