26 octobre 2006
À quelle antenne logez-vous?
«À vous maintenant [...] de nous dire à quelle antenne vous logez dans ce dossier.» (Denis Beaudin, responsable du Mouvement Sauvons nos Églises.)
Voilà une antenne légèrement défectueuse : je crois que l'auteur a voulu parler d'enseigne, car il ne saurait être question non plus d'une antienne, ni ancienne ni nouvelle, à mon avis.
Cependant, d'après ce que je vois dans le Petit Robert, le Lexis, le Multidictionnaire et le Trésor de la langue française informatisé, l'expression être logé à telle enseigne, ou loger, être logé à la même enseigne que quelqu'un, évoque l'idée qu'on se trouve dans une situation fâcheuse, dans l'embarras.
On aurait pu s'en tenir à un tour non imagé :
... quel est votre point de vue concernant ce dossier.
... ce que vous pensez de ce dossier.
C'est moins vivant?
Moins divertissant, je vous le concède.
Line Gingras
Québec
«Lettres : Les églises frissonnent déjà» : http://www.ledevoir.com/2006/10/16/120507.html
02:39 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : langue française, presse, journal, médias
20 octobre 2006
Exiger à quelqu'un
«... arrêtez d'exiger des "miracles" aux églises.» (Denis Beaudin, responsable du Mouvement Sauvons nos Églises.)
Le verbe exiger construit son complément second au moyen de la préposition de : on exige quelque chose de quelqu'un :
Celui qui exige beaucoup de lui-même se sent naturellement porté à beaucoup exiger d'autrui. (Gide, dans le Petit Robert.)
Exiger peut toutefois, dans bien des cas, être remplacé par réclamer, dont le complément second s'introduit souvent par la préposition à :
Elle réclame une indemnité à la compagnie. (Petit Robert.)
Dans la phrase qui nous occupe, on aurait pu écrire à mon avis :
... arrêtez de réclamer des «miracles» aux églises.
... arrêtez de demander des «miracles» aux églises.
... arrêtez d'exiger des «miracles» des églises.
La dernière formulation me paraît cependant moins heureuse, pour des raisons d'euphonie.
Line Gingras
Québec
«Lettres : Les églises frissonnent déjà» : http://www.ledevoir.com/2006/10/16/120507.html
03:20 | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, journal
18 octobre 2006
Accommoder les besoins
«... ceux qui, tel le candidat à la direction du PLC, Michael Ignatieff, "désirent un changement véritable au sein de la fédération canadienne [pour] accommoder les besoins particuliers du Québec".» (Antoine Robitaille citant Philippe Paquette, président du groupe Uni.ca.)
D'après ce que je vois dans le Petit Robert, le Lexis, le Multidictionnaire et le Hanse-Blampain, accommoder s'emploie comme verbe transitif, dans la langue moderne, au sens de «préparer (des aliments) pour la consommation» (Petit Robert) :
Accommoder une salade. (Lexis.)
Le Trésor de la langue française informatisé donne pour vieillie son utilisation au sens de «traiter quelqu'un avantageusement» :
... si vous avez quelque chose de prêt, je crois que mon éditeur serait coulant et vous accommoderait. (Hugo.)
Des ouvrages canadiens - le Multidictionnaire, le Dagenais et le Colpron - signalent toutefois comme anglicisme un emploi pour le moins très voisin, au sens de «rendre service», «aider», «satisfaire»; plutôt que Je voudrais bien vous accommoder, on recommande de dire : Je voudrais bien vous rendre service ou vous être utile ou vous être agréable.
Il est certain qu'en anglais, to accommodate someone, to accommodate their needs sont des tours très vivants, que l'on évite de traduire de façon littérale. Dans la phrase à l'étude, il aurait fallu écrire :
... [pour] répondre aux besoins particuliers du Québec.
Line Gingras
Québec
«Des fédéralistes prédisent qu'ils vont perdre le prochain référendum» : http://www.ledevoir.com/2006/09/28/119251.html
«Le Canada anglais refuse de comprendre» : http://www.uni.ca/editorials/englishcanada_f.php
03:50 | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : langue française, anglicisme, archaïsme, journal