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24 septembre 2006

Pérorer quelque chose

Pérorer, verbe transitif ou intransitif; grammaire française; syntaxe du français.

«... s'ils désirent continuer à se prétendre les remparts de la démocratie [...], comme on les entend si souvent le pérorer.» (Jean Robillard, philosophe et professeur de communication à TELUQ-UQAM.)

D'après le Petit Robert, le Lexis et le Multidictionnaire, pérorer est un verbe intransitif (c'est-à-dire n'admettant pas de complément d'objet) qui signifie «discourir, parler d'une manière prétentieuse, avec emphase» (Petit Robert) :

En se voyant écoutée avec extase, elle s'habitua par degrés à s'écouter aussi, prit plaisir à pérorer. (Balzac, dans le Petit Robert.)

Stein paradait, pérorait, distribuait des conseils, donnait des ordres, abusait, amusait infatigablement son monde. (Cendrars, dans le Trésor de la langue française informatisé.)

À la terrasse du café, Gabriel, vidant sa cinquième grenadine, pérorait devant une assemblée. (Queneau, dans le Lexis.)

Le Trésor le reçoit cependant comme verbe transitif, au sens de «dire (quelque chose) avec emphase» :

M. Rezeau remit une cartouche de 7 dans le canon droit de son vieux Damas et pérora : - Quand un lièvre vous part dans la culotte, il faut attendre pour le tirer et viser aux oreilles. (Bazin.)

Il n'est donc pas interdit de pérorer quelque chose, bien que ce ne soit sans doute pas la meilleure façon de se faire des amis.

* * * * *

Pérori, pérora...

Par la magie des sons et puisqu'aujourd'hui c'est dimanche, vous voici transporté dans le p'tit rang croche, devant la maison verte de mon enfance, à l'époque lointaine où nous avions quelques poules.

Ou peut-être que nous n'en avions plus. Mais il devait exister encore un poulailler, puisque ce matin-là, justement, je m'y étais glissée pour l'explorer.

Il faisait sombre et il y avait du foin. Et dans le foin, bien cachés, devinez quoi? un œuf, deux beaux œufs. Première fois que je ramassais des œufs. J'ai retroussé mon chandail, et fière de mon trésor je suis rentrée les offrir à grand-maman.

Et là, comme j'arrivais dans la cuisine, patatras!

Je n'y suis plus retournée.

Line Gingras
Québec

«Réflexe journalistique» : http://www.ledevoir.com/2006/09/22/118760.html

17 septembre 2006

Toiles d'araignées

«Oui, il y a des fous dont l'esprit est fêlé.» (Denise Bombardier.)

Nous voilà prévenus. Méfions-nous, ceux-là sont assurément les plus dangereux. Les autres fous ne doivent être que de pauvres cloches un peu sonnées, qu'étouffent les toiles d'araignées.

* * * * *

Chaque été, un beau dimanche, nous partions toute la famille en pèlerinage à Sainte-Anne-de-Beaupré. Ce n'était pas vraiment la fête, non, pas tout de suite, parce que d'abord il fallait réciter le chapelet, pour que la sainte Vierge demande à la bonne sainte Anne de nous éviter un accident. Dommage d'être ainsi occupés de choses célestes : le vieux chemin de Duchesnay, avec ses cahots à n'en plus finir, était si amusant...

Mais bon. Bientôt nous arrivions à Sainte-Catherine. Je ne savais pas, alors, que nous passions à proximité du manoir, invisible, où ont vécu Anne Hébert et Saint-Denys Garneau; je ne savais pas non plus qu'une vieille maison, tout près, deviendrait un jour celle de mon oncle Jacquelin. Sainte-Catherine n'était qu'un village traversé par la route, où les voitures allaient trop vite.

Enfin Québec. Nous longions le cap, les maisons serrées juste au pied, menacées par les éboulements. Plus loin, une fois le fleuve à notre droite, c'étaient à gauche des villages perchés. Étranges. Et puis les chutes Montmorency. Quel contraste avec le p'tit rang croche, avec ma rivière et le champ de patates, le moulin à scie et la montagne ronde... Mais voilà que nous apercevions la basilique.

Il y avait des foules innombrables. Des dizaines et des dizaines de fauteuils roulants. Et ce sanctuaire immense, avec sa statue miraculeuse, avec en ex-voto toutes ces béquilles et ces bottines spéciales abandonnées là par des infirmes que la bonne sainte Anne, disait-on, avait guéris...

Il y a dix jours, c'était un jeudi, j'ai revu cette route au bord du fleuve, et ces villages, et la basilique comme neuve, en face de l'île d'Orléans. Elle est de belles proportions, avec des vitraux d'un bleu magnifique. Daignez, sainte Anne, en un si beau jour..., ont chanté les cloches, comme autrefois. Mais j'y ai croisé peu de monde en ce début d'automne; pas d'infirmes; pas d'enfants.

Et le chemin de croix, ce sentier en lacet dans la montagne, pour lequel j'étais venue, était bordé des mêmes sculptures quelconques, couvertes de toiles d'araignées.

Line Gingras
Québec
  

«L'horreur est humaine» : http://www.ledevoir.com/2006/09/16/118242.html