02 novembre 2008
Une puce obstinément française
Ensemble vocal André Martin; EVAM; Les jours s'en vont..., je demeure; chant choral; chansons a cappella; concert à l'église Notre-Dame-des-Victoires, Québec.
Ah! l'agaçante puce :
Quand mes yeux je pense livrer au sommeil,
Elle vient me piquer, me démange, et me point, et me garde de dormir.
Jean-Antoine de Baïf, à qui sont attribuées les paroles de cette chanson de Claude Le Jeune (Une puce), vivait au XVIe siècle; il s'exprimait en français, à l'évidence, même si nous avons parfois un tantinet de misère à comprendre certains des mots et des tournures qu'il emploie.
Par « nous », je veux dire la vingtaine de choristes composant cet automne l'Ensemble vocal André Martin, qui donnera dans trois semaines un concert où sera à l'honneur la chanson française a cappella, de Ronsard à Félix Leclerc.
Que fait donc au juste cette puce qui « me pique, me démange, et me point »? N'est-ce pas « pointe » qu'il faudrait lire? nous sommes-nous demandé un soir de répétition. Pointe, présent de l'indicatif du verbe pointer?
J'ouvre mon dictionnaire d'ancien français – où je trouve des arguments convaincants, oui, mais en faveur du verbe poindre. Sens 1 : piquer; sens 3 : éperonner; sens 8 : faire souffrir, incommoder.
Ainsi, les cruelles puces du temps jadis sont demeurées telles aujourd'hui : obsédantes ritournelles de nos amours elles nous tourmentent, sans répit. Mieux vaut en rire...
Peu importe le siècle auquel nous appartenons, francophones d'Europe ou d'Amérique, nous vivons d'eau et de lumière; de tendresse, de jeux et de folie; de joies et d'espoir; et quelquefois de regrets atrocement doux. Cette âme qui demeure, et que révèlent nos chansons, s'incarne dans notre langue commune.
Qu'ils s'appellent Charles d'Orléans, Pierre de Ronsard, Clément Marot, Guillaume Apollinaire, Félix Leclerc ou Sylvain Lelièvre, nos poètes disent qui nous sommes, notre façon d'être au monde; ils ont la voix de notre cœur. Si vous êtes à Québec le dimanche 23 novembre, venez les entendre.
Line Gingras
Les jours s'en vont..., je demeure
Chansons françaises, de Ronsard à Félix Leclerc
Ensemble vocal André Martin
Avec la participation de Richard Joubert (commentaires) et d'Alfred Marin (viole de gambe)
Église Notre-Dame-des-Victoires (Place Royale, Québec)
Dimanche 23 novembre 2008, 14 h
Entrée : 15 $
04:30 Publié dans Chant choral, Le billet du dimanche | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique, chant choral, chanson française, québec
01 novembre 2008
Il
- S'il y a une constante dans l'autonomisme de M. Dumont, c'est plutôt dans son refus catégorique d'expliquer comment il forcerait le gouvernement fédéral à négocier et ce qu'il ferait dans l'hypothèse hautement probable où il opposerait une fin de non-recevoir catégorique à ses demandes. (Michel David.)
Cette phrase est confuse à la première lecture. Le premier il, impersonnel (s'il y a), ne pose pas de problème; mais si les deuxième et troisième désignent Mario Dumont, le quatrième (il opposerait) représente le gouvernement fédéral. Ce changement d'antécédent n'est pas souhaitable.
J'écrirais plutôt :
... comment il forcerait le gouvernement fédéral à négocier et ce qu'il ferait dans l'hypothèse hautement probable où celui-ci opposerait une fin de non-recevoir catégorique à ses demandes.
... comment il forcerait le gouvernement fédéral à négocier et ce qu'il ferait dans l'hypothèse hautement probable où M. Harper opposerait une fin de non-recevoir catégorique à ses demandes.
... comment il forcerait le gouvernement fédéral à négocier et ce qu'il ferait dans l'hypothèse hautement probable où Ottawa opposerait une fin de non-recevoir catégorique à ses demandes.
... comment il forcerait le gouvernement fédéral à négocier et ce qu'il ferait dans l'hypothèse hautement probable où l'on opposerait une fin de non-recevoir catégorique à ses demandes.
Line Gingras
Québec
« Mario et sa rossinante » : http://www.ledevoir.com/2008/10/25/212506.html
03:33 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, syntaxe, journalisme, presse
31 octobre 2008
Incapables à tancer
Capable à, capable de; incapable à, incapable de; grammaire française; syntaxe du français; prépositions.
- Les Américains deviennent incapables de faire la leçon économique et de plus en plus incapables à tancer politiquement. Ils doivent devenir partenaires d'un plus grand ensemble et cesser de dicter ou de sanctionner. (Gil Courtemanche.)
Les adjectifs apte et inapte introduisent leur complément au moyen de la préposition à; capable et incapable, cependant, se construisent avec de :
[L'homme] est incapable de souffrir ou d'être heureux longtemps. Il n'est donc capable de rien qui vaille. (Camus, dans le Petit Robert.)
Peut-être n'aurait-elle pas ri. Elle était capable de comprendre. (Mallet-Joris, dans le Lexis.)
Tu es incapable de m'écouter dix minutes. (Bastide, dans le Lexis.)
Quand je regarde un homme dans les yeux, je deviens incapable de lui donner des ordres. (Sartre, dans le Lexis.)
Quand une mère n'est plus capable de reconnaître son fils, c'est que son rôle sur la terre est fini. (Camus, dans le Trésor de la langue française informatisé.)
... son ancien ami n'était plus capable de discernement, c'était une machine inerte, sensible encore à la douleur physique, mais incapable de la combattre ou de la détourner. (A. Dumas père, dans le Trésor.)
Incapable de lire, d'écrire, de me promener, je passe presque tout le jour étendu sur mon lit, accaparé par la douleur. (Gide, dans le Trésor.)
Voir aussi le Multidictionnaire et le Hanse-Blampain.
Line Gingras
Québec
« Le déclin de l'empire américain » : http://www.ledevoir.com/2008/10/25/212504.html
02:37 Publié dans Cultiver le doute | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, journalisme
30 octobre 2008
Je lui ai fait visité...
Faire suivi du participe passé ou de l'infinitif; grammaire française; orthographe.
- « J'ai pris la sous-ministre par l'oreille (c'est une image) et je lui ai fait visité cette zone protégée... » (Christian Yaccarini, cité par Stéphane Baillargeon.)
Le verbe faire ne doit pas être suivi d'un participe passé, mais d'un infinitif :
Je lui ai fait comprendre que c'était une zone protégée.
Je l'ai fait sortir de la zone protégée.
... je lui ai fait visiter cette zone protégée...
Et comme c'est demain l'Halloween :
La vilaine grammairienne a pris le pauvre journaliste surmené par l'oreille et lui a fait recopier deux cent vingt-deux fois : « Je lui ai fait visiter... »
Line Gingras
Québec
« Un starchitecte pour le 2.22 » : http://www.ledevoir.com/2008/10/25/212572.html
16:36 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, grammaire, orthographe, journalisme
29 octobre 2008
Avoir raison que
Avoir raison que; syntaxe du français.
- Alors qu'il s'apprêtait à livrer un discours à forte teneur économique, M. Dion a poursuivi en rappelant les réussites libérales en matière de lutte contre le déficit pendant les années 1990. « Tous les Canadiens ont travaillé, mais s'il fallait en nommer trois, n'ai-je pas raison qu'il faudrait nommer trois Québécois [...]? » (Stéphane Dion, cité par Hélène Buzzetti. Monsieur Dion s'adressait aux membres de l'Empire Club et de l'Economic Club de Toronto; sans doute s'exprimait-il en anglais.)
On peut très bien employer avoir raison de + infinitif :
La suite lamentable n'a que trop montré comme il avait raison de se méfier de nous. (Butor, dans le Lexis.)
Aucun des neuf ouvrages de difficultés que j'ai consultés ne mentionne cependant le tour avoir raison que; je ne trouve pas non plus cette construction dans les dictionnaires généraux que j'ai sous la main (Petit Robert, Lexis, Trésor de la langue française informatisé). On aurait pu dire, à mon avis :
... n'ai-je pas raison de penser qu'il faudrait nommer trois Québécois...?
... ne faudrait-il pas nommer trois Québécois...?
... ne devrait-on pas nommer trois Québécois...?
... n'aurait-on pas raison de nommer trois Québécois...?
Line Gingras
Québec
« La grosse machine libérale se réveille » : http://www.ledevoir.com/2008/10/09/209842.html
05:36 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, syntaxe, journalisme, presse
28 octobre 2008
À répétition
- Selon une copie du procès-verbal dont l'AFP s'est procuré copie lundi, les deux jeunes, envisageaient de tuer 102 Noirs, avec pour but ultime de tenter d'« assassiner le candidat à la présidentielle Barack Obama », qui serait le premier premier président noir américain s'il était élu le 4 novembre. (Daphné Benoît et Lucile Malandain, Associated Press.)
Selon le procès-verbal dont l'AFP s'est procuré copie lundi, les deux jeunes envisageaient...
Je ne vois aucune raison de séparer le sujet du verbe par la virgule.
- Déjà menacé, le candidat bénéficie depuis le début de sa campagne début 2007 de la protection des agents du Secret Service...
Déjà menacé, le candidat bénéficie depuis le commencement [ou depuis le lancement] de sa campagne, début 2007, de la protection...
Le syntagme début 2007 apporte une précision qui n'est pas essentielle au sens de la phrase; les virgules l'encadrent, un peu comme le feraient des parenthèses.
Line Gingras
Québec
« Deux skinheads arrêtés pour menaces de mort contre Obama » : http://www.cyberpresse.ca/international/etats-unis/200810/27/01-33470-deux-skinheads-arretes-pour-menaces-de-mort-contre-obama.php
04:16 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, grammaire, journalisme, presse
27 octobre 2008
À l'effet que
À l'effet que; to the effect that; anglicisme; calque de l'anglais.
- Selon M. Michaud, la vision de Paul Desmarais est « assimilatrice et fédéralisante ». Yves Michaud comprend mal, entre autres, la déclaration du président Sarkozy à l'effet que le monde n'a surtout pas besoin de division en cette période de crise financière. (PC.)
D'après le Multidictionnaire, le Dagenais, le Chouinard et le Colpron, la locution à l'effet que est le calque de l'anglais to the effect that. On aurait pu écrire :
... la déclaration du président Sarkozy suivant laquelle le monde n'a surtout pas besoin de division...
... la déclaration du président Sarkozy voulant que le monde n'ait surtout pas besoin de division...
Line Gingras
Québec
« Yves Michaud n'est pas surpris des propos de Sarkozy » : http://www.cyberpresse.ca/dossiers/francophonie/200810/18/01-30555-yves-michaud-nest-pas-surpris-des-propos-de-sarkozy.php
02:30 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, anglicisme, journalisme, presse