10 décembre 2007
Des absences plus longues que prévues
« Les absences de Steve Bégin et Bryan Smolinski seront plus longues que prévues. » (François Gagnon.)
Le journaliste semble dire que l'on avait prévu les absences des deux joueurs. Ce n'est cependant pas le cas : les absences étant consécutives à des blessures, on ne pouvait les prévoir; ce que l'on avait prévu, par contre, à la suite d'un premier examen des blessés, c'est qu'elles dureraient moins longtemps que ce que l'on pense maintenant. Les absences seront de fait plus longues qu'on ne l'avait prévu - ou, dans une langue relâchée, avec ellipse du sujet et de l'auxiliaire avoir, plus longues que prévu.
Le Petit Robert, consulté à l'article « prévu », donne un exemple de cette construction :
Une marée plus forte que prévu. [On avait prévu non pas la marée, qui se produirait de toute façon, mais que la marée serait moins forte.]
Line Gingras
Québec
« Bégin et Smolinski hors combat » : http://blogues.cyberpresse.ca/gagnon/?p=70312759
05:25 | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : langue française, grammaire, orthographe, journalisme
09 décembre 2007
Rabattre les oreilles
« Par exemple, madame la ministre et son règlement de trois minutes dont on nous rabat les oreilles ces jours-ci. » (Pierre Foglia.)
On rabat le caquet à quelqu'un, mais on lui rebat les oreilles :
S'il n'arrête pas de me rebattre les oreilles de ses récriminations, je vais lui rabattre le caquet.
Line Gingras
Québec
« Trois minutes d'écologie » : http://www.cyberpresse.ca/article/20071208/CPOPINIONS05/7...
18:40 Publié dans Cultiver le doute | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, journalisme, presse, médias
08 décembre 2007
Matte ou mate?
« ... une feuille de papier d'aluminium a deux faces : une brillante et une presque matte. » (Fabien Deglise.)
Le contraire de brillante, c'est mate :
Peinture mate. (Petit Robert.)
Une couleur mate. (Hanse-Blampain.)
Line Gingras
Québec
« Quand maman Dion perd la boule... Magik » : http://www.ledevoir.com/2007/12/08/167711.html
04:29 Publié dans Cultiver le doute | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, orthographe, journalisme, presse
07 décembre 2007
Au tournant du début...
« Si des élections fédérales devaient se présenter au tournant du début de l'an prochain, elles coïncideraient avec l'intensification des grandes manœuvres internationales en vue de l'après-Kyoto. » (Chantal Hébert.)
« Avec une campagne électorale qui se dessine au tournant du début de l'année, on attend encore de voir si le chef conservateur a déniché quelques candidats d'envergure pour rehausser le calibre de son contingent québécois. » (Même journaliste, autre article.)
Le substantif tournant peut désigner le « moment où ce qui évolue change de direction, devient autre » (Petit Robert) :
L'entreprise arrive à un tournant décisif de ses activités de diversification. (Multidictionnaire.)
Ce grand débat sera sûrement le tournant dans la campagne électorale en cours. (Chouinard.)
Au dernier tournant de la vie, la curiosité qui nous penche sur les livres devient rétrospective. (Mauriac, dans le Trésor de la langue française informatisé.)
Sauf pour quelques individus privilégiés, la quarantaine marque un tournant décisif. (L'Express, dans le Trésor.)
Cette bataille a marqué un tournant dans l'histoire. (Lexis.)
Il est à un tournant de sa carrière. (Petit Robert.)
Le Petit Robert donne en outre cet exemple :
Au tournant du siècle.
Cette expression, selon ce qu'indique une recherche Google, s'applique souvent aux dernières années d'un siècle, et aux premières du siècle suivant.
Le Meertens, à l'article « turn », propose toutefois au début du siècle comme équivalent de at the turn of the century. Dans Le Robert & Collins Super Senior, l'expression est rendue par en début de siècle ou en fin de siècle; et les auteurs traduisent at the turn of the year par vers la fin de l'année, en fin d'année.
En tout cas, rien ne me permet de croire que la journaliste ait voulu dire quoi que ce soit, par la curieuse expression au tournant du début, qu'un simple au début (ou dès le début) n'aurait pas exprimé; de fait, elle semble d'avis que des élections fédérales pourraient avoir lieu en février...
Line Gingras
Québec
« Un an plus tard » : http://www.ledevoir.com/2007/11/26/166081.html
« Le bulletin du premier ministre » : http://www.ledevoir.com/2007/12/03/167026.html
23:55 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, journalisme, presse, médias
06 décembre 2007
Démêlées ou démêlés
« ... Luc Lavoie, qui a guidé avec un rare brio les relations publiques de Brian Mulroney dans ses démêlées avec Herr Schreiber... » (Patrick Lagacé.)
On écrit un démêlé, des démêlés; démêlé est un nom masculin qui s'emploie généralement au pluriel, au sens de « Contestation, querelle sur une affaire qui demande à être éclaircie et qui est l'objet de débats entre deux parties » (Trésor de la langue française informatisé) :
L'origine des démêlés du nouveau roi avec le pape. (Bainville, dans le Trésor.)
Line Gingras
Québec
« La meneuse de claques » : http://blogues.cyberpresse.ca/lagace/?p=70720675#comments
06:26 Publié dans Cultiver le doute | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : langue française, orthographe, journalisme, médias
05 décembre 2007
Décimer le respect
« "Le folklore et la fierté qui entouraient la GRC s'étiolaient depuis quelque temps. Mais la vidéo de la mort de Robert Dziekanski a décimé ce qui restait du respect que les Canadiens ont longtemps éprouvé à l'endroit de leur police nationale." » (Manon Cornellier, citant John Martin, du Vancouver Province.)
Dans l'Antiquité romaine, décimer signifiait « mettre à mort une personne sur dix, désignée par le sort » (Petit Robert) :
Strabon [...] fit décimer ses soldats coupables d'avoir massacré des décurions milanais. (Mérimée, dans le Trésor de la langue française informatisé.)
De nos jours, ce verbe s'emploie couramment au sens de « faire périr un grand nombre de personnes » :
Épidémie, guerre, famine, fléau qui décime une population, un pays, une armée. (Exemples relevés dans le Petit Robert, le Multidictionnaire et le Hanse-Blampain.)
Ces régiments qui ont sauvagement décimé le prolétariat révolutionnaire? (Martin du Gard, dans le Lexis.)
Ces tribus que les puissances esclavagistes décimaient et déportaient. (Mauriac, dans le Trésor.)
La Bible et Hérodote sont d'accord pour signaler l'apparition fulgurante d'une peste qui décima, en une nuit, les 180 000 hommes de l'armée assyrienne, sauvant ainsi l'empire égyptien. (Artaud, dans le Trésor.)
Le Trésor donne en outre les exemples suivants, où décimer est utilisé par analogie ou par métaphore :
La seule et unique couche de sa fille [...] avait décimé les dents, fait tomber les cils, terni les yeux, gauchi la taille, flétri le teint. (Balzac, dans le Trésor.)
Tous les mauvais miasmes qui déciment l'organisme du soldat. (Martin du Gard, dans le Trésor.)
On lui [au poète] décima son vocabulaire. (Valéry, dans le Trésor.)
J'aimerais, en ce qui concerne ces trois dernières phrases, attirer l'attention sur le complément d'objet direct : nous avons affaire dans le premier cas à un pluriel, les dents; il est question dans le deuxième exemple d'un organisme - composé de nombreux organes; enfin, Valéry parle du vocabulaire, dont je n'apprendrai à personne qu'il réunit une grande quantité de mots.
Mais le respect? Comment, à la lumière de ce qui précède, quelque chose ou quelqu'un pourrait-il décimer le respect? Le respect n'est pas un ensemble dont on peut isoler des éléments. Je proposerais plutôt :
... la vidéo de la mort de Robert Dziekanski a détruit / a anéanti ce qui restait du respect que les Canadiens ont longtemps éprouvé à l'endroit de leur police nationale.
* * * * *
« "Les passagers avaient l'habitude d'être traités comme des clients dans les aéroports internationaux canadiens. Maintenant, il semble être perçus d'abord et avant tout comme des menaces à la sécurité." » (Cette fois, il s'agit de la traduction d'un article du Leader-Post, de Regina.)
De toute évidence, il semble ne devrait pas être présenté comme un tour impersonnel : les passagers semblent être perçus - ils semblent être perçus.
Line Gingras
Québec
« Revue de presse - Électrochoc policier » : http://www.ledevoir.com/2007/11/24/165847.html
15:00 Publié dans Cultiver le doute, On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : langue française, impropriété, journalisme, presse
04 décembre 2007
Mémoire défaillante
« ... une étude japonaise qui bat en brèche l'idée répandue selon laquelle que l'homme est supérieur au singe pour toutes les fonctions cognitives. » (AP.)
« Un test a mis comparé trois chimpanzés de cinq ans, qui avaient appris l'ordre des chiffres de 1 à 9, et une dizaine de volontaires humains. »
Le journaliste a voulu modifier la construction de ces deux phrases; mais sitôt les changements apportés, croirait-on, il s'est empressé d'oublier les avoir faits, et ne s'est donc pas relu. C'est peut-être vrai, que notre mémoire ne vaut pas celle des chimpanzés...
Line Gingras
Québec
« Le chimpanzé a une meilleure mémoire que l'homme » : http://www.ledevoir.com/2007/12/04/167139.html
02:00 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : langue française, journalisme, presse, médias
03 décembre 2007
Un privilège qui incombe aux députés
« En point de presse, il [le député François Gendron] a rappelé qu'il était normal qu'un gouvernement informe la population de ses orientations et "communique avec le public" mais que, dans le cas qui nous occupe, la ministre était entrée dans les détails, un privilège qui incombe normalement aux députés au moment de la présentation du projet de loi à l'Assemblée nationale. » (Isabelle Porter.)
D'après ce que je vois dans le Petit Robert, le Multidictionnaire, le Lexis et le Trésor de la langue française informatisé, incomber se dit à propos d'une charge, d'un devoir, d'une obligation, d'une responsabilité :
Ces réparations incombent au propriétaire de la maison. (Lexis.)
Dépenses, frais, fonction, mission, soin, tâche incombant à une personne. (Trésor.)
C'est un concert unanime de tout ce qui se prétend chef de quelqu'un ou de quelque chose pour rejeter la responsabilité qui lui incombe sur le subalterne coupable d'être trop bien entré dans l'esprit de ses supérieurs. (Clemenceau, dans le Trésor.)
En fait, c'est aux États-Unis qu'appartenait la décision, puisque l'effort principal leur incombait dorénavant. (De Gaulle, dans le Trésor.)
Or, le privilège se définit comme un « droit, [un] avantage particulier accordé à un seul individu ou à une catégorie, en dehors de la loi commune » (Petit Robert). Un privilège ne saurait donc incomber aux députés - il leur appartient ou leur revient, plutôt. Dans la phrase qui nous intéresse, étant donné que ce ne sont pas les députés qui entrent dans les détails, je crois qu'il aurait fallu écrire :
... la ministre était entrée dans les détails, ce qui se fait normalement devant les députés, au moment de la présentation du projet de loi à l'Assemblée nationale.
Line Gingras
Québec
« La ministre des Transports heurte les susceptibilités de l'opposition péquiste » : http://www.ledevoir.com/2007/11/14/164365.html
04:10 Publié dans Cultiver le doute | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : langue française, impropriété, journalisme, presse
02 décembre 2007
Lumière des nations
Ensemble vocal André Martin; EVAM; Congrès eucharistique international; Québec; église Saint-Dominique; musique classique; musique religieuse; concert.
Lumière des nations... Ce sera le thème du concert que l'Ensemble vocal André Martin (EVAM), dont je fais partie, présentera le samedi 26 janvier 2008 à 20 h, à l'église Saint-Dominique de Québec.
Rappelez-vous cette immense acclamation des anges, que les monts de Galilée ont répercutée jusqu'à nous : Paix sur la terre aux hommes de bonne volonté! Pour le premier de nos deux concerts se rapportant au volet culturel du Congrès eucharistique international, événement qui rassemblera à Québec, en juin prochain, des catholiques du monde entier, nous avons voulu évoquer l'universalité de la quête spirituelle.
À la source de toutes les religions il y a une soif, insatiable, d'amour, de respect, de sérénité; il y a le besoin de trouver un sens à la vie; il y a une recherche de dépassement, dont le champ est l'infini. Nous venons au monde dans une communauté culturelle donnée, au sein d'une société qui, dans une certaine mesure, façonne nos croyances; mais nous avons tous, me semble-t-il, la même soif, la même faim de connaître ce qui est plus grand que nous, cet esprit qui réunit l'humanité sous son aile.
Comment cette aspiration s'est-elle traduite dans la chrétienté, chez des peuples différents? Cette question a guidé notre choix des œuvres au programme; nous ne pouvons cependant, en une soirée, que donner un aperçu des formes diverses qu'a empruntées, au cours des siècles, l'expression d'une espérance qui a animé tant de nos semblables. Ont été retenus, en plus de brèves pièces attachantes, dont plusieurs a cappella, des extraits de chefs-d'œuvre parmi les plus marquants. Ont été appelés à témoigner de leur foi certains des compositeurs les plus éminents - de Purcell, Lassus et Victoria à Fauré, Poulenc et Rachmaninoff, sans oublier Bach, Mozart, Bruckner, Händel, Vivaldi, Monteverdi...
L'Ensemble vocal André Martin sera accompagné, pour ce concert dédié à l'étincelle divine que nous portons en nous, par un orchestre d'une douzaine de musiciens.
Line Gingras
Québec
06:25 Publié dans Chant choral | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : musique classique, Québec, chant choral, religion
01 décembre 2007
Faire planer une menace à quelqu'un
« Ceux qui fréquent la mosquée jour et nuit, qui font évacuer des cabanes à sucre entières pour prier Allah, qui lapident leurs (multiples) épouses sur la voie publique, qui font planer une menace de djihad armé à une directrice d'école si la flûte à bec est au programme du cours de musique... » (Patrick Lagacé, dans La Presse.)
Faudra que je demande à mon beau-frère ce qu'il peut bien avoir contre la flûte à bec, mon instrument préféré...
Mais non, le journaliste plaisante. Seulement, je suis d'avis qu'il se trompe de préposition; d'après les exemples que donnent les dictionnaires généraux, une menace ne plane pas à quelqu'un ou quelque chose, mais sur quelqu'un ou quelque chose :
... la douleur et le deuil qui planaient sur cette maison. (Balzac, dans le Petit Robert.)
Un régime de terreur planait sur la Gaule. (Fustel de Coulanges, dans le Lexis.)
C'est une cérémonie religieuse qu'une tragédie grecque. [...] toujours le destin planant sur la vie de l'homme. (Staël, dans le Trésor de la langue française informatisé.)
L'enfant ne répond pas, obstinément, laissant planer sur son père le soupçon que c'est lui qui l'a jeté par la fenêtre. (Goncourt, dans le Trésor.)
Il manœuvre avec son dossier secret pour laisser planer un doute [...] sur l'innocence de Dreyfus. (Clemenceau, dans le Trésor.)
Line Gingras
Québec
« Voile maudit » : http://www.cyberpresse.ca/article/20071126/CPOPINIONS05/7...
06:04 Publié dans Cultiver le doute | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : langue française, syntaxe, journalisme, presse