15 octobre 2006
En autant que
«Au Moyen-Âge, prétend-on, le bon peuple aimait bien la Sainte Inquisition en autant qu'il n'en était pas lui-même la victime.» (Victor-Lévy Beaulieu, écrivain.)
D'après ce que je vois dans le Multidictionnaire, le Colpron et le Dagenais, en autant que est le calque de l'anglais inasmuch as, insofar as (je trouve également les graphies in as much as, in so far as); il faudrait le remplacer par dans la mesure où, pour autant que, pourvu que.
Plus particulièrement, le Multidictionnaire, le Colpron et le Chouinard signalent, comme calque de as far as I am concerned, le tour très fréquent en autant que je suis concerné; il conviendrait d'employer plutôt en ce qui me concerne, quant à moi, pour ma part.
Et le Hanse-Blampain donne en autant que je le sache pour une expression non française utilisée au Québec à la place de pour autant que je le sache.
De fait, je ne trouve en autant que ni dans le Petit Robert (2007), ni dans le Lexis, ni dans le Trésor de la langue française informatisé.
On aurait pu écrire :
... le bon peuple aimait bien la Sainte Inquisition pour autant qu'il n'en était pas lui-même la victime.
... le bon peuple aimait bien la Sainte Inquisition dans la mesure où il n'en était pas lui-même la victime.
Line Gingras
Québec
«Du fascisme» : http://www.cyberpresse.ca/article/20060930/CPOPINIONS/609...
16:15 | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : langue française, anglicisme, presse, médias
14 octobre 2006
Prendre un pari
«... Michael Ignatieff a pris un pari audacieux : même si tout le monde le considérait comme le meneur, il n’allait pas agir de façon prudente en évitant la controverse.» (Michel C. Auger.)
D'après ce que je vois dans le Petit Robert, le Lexis, le Multidictionnaire et le Trésor de la langue française informatisé, au sens de parier, on dit engager un pari, et surtout faire un pari :
Faire un pari dangereux. (Lexis.)
Je vous fais un pari : vous ne resterez pas un an en Italie. (Beauvoir, dans le Trésor.)
J'ai fait le pari que notre équipe gagnerait : elle a perdu, donc j'ai dû donner 1 $ à Luc. (Multidictionnaire.)
On dirait qu'elle a fait le pari de me dégoûter de moi en me ressemblant. (Bousquet, dans le Trésor.)
Prendre les paris s'emploie également, bien entendu, mais pour celui qui se charge d'organiser, de recueillir les paris :
Le 18 septembre, les deux dirigeants de Bwin, une société de paris en ligne, ont été mis en examen pour infraction à la réglementation sur les jeux. En France, seuls le PMU [Pari Mutuel Urbain] et la Française des Jeux sont en effet autorisés à prendre les paris. (Le Figaro.fr.)
Line Gingras
Québec
«Le pari réussi de Michael Ignatieff» : http://www.cyberpresse.ca/article/20061011/CPBLOGUES07/61...
«Les sites de jeux en ligne ébranlés» : http://www.lefigaro.fr/eco-entreprises/20061002.WWW000000...
02:35 | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : langue française, journalisme, médias, blog de journaliste
13 octobre 2006
Démocratie canadienne
«Plusieurs de ces résolutions tranchent par leur fermeté. Ainsi, une de celles-ci exhorte le Parti libéral du Canada à s'autoréglementer pour que 52 % de ses députés élus soient des femmes d'ici trois élections.» (Hélène Buzzetti.)
Il y a donc des députés qui ne sont pas élus, au Canada? en plus des sénateurs? À mon sens, on a voulu parler des candidats élus, ou tout simplement des députés.
Line Gingras
Québec
«Les libéraux du Québec veulent défendre la parité des sexes aux Communes» : http://www.ledevoir.com/2006/10/12/120254.html
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12 octobre 2006
La protection des incendies
«... la construction des chemins forestiers et la protection des incendies de forêt.» (Jean-Robert Sansfaçon.)
Le Petit Robert, le Lexis et le Trésor de la langue française informatisé, consultés aux articles «protection» et «incendie», ne donnent que le tour protection contre l'incendie.
De fait, bien que le verbe protéger construise de préférence son complément second de chose avec la préposition de «si le sens est simplement "mettre à l'abri" plutôt que "mettre à l'abri d'un danger"» (Hanse et Blampain), le nom protection, lorsqu'il est suivi d'un complément indiquant la chose ou la personne contre laquelle on veut protéger, s'utilise toujours avec la préposition contre, d'après les exemples relevés dans les ouvrages généraux que j'ai sous la main :
Un rempart protégeait la ville contre l'ennemi. (Hanse-Blampain.)
Nous connaissons assez bien l'illusion pour nous trouver protégés contre elle. (Paulhan, dans le Petit Robert.)
Elle se protégeait de la pluie avec un vieil imperméable. (Hanse-Blampain.)
Protection contre les maladies, contre les accidents du travail. (Petit Robert.)
Elle remarqua tout à coup qu'il portait des gants de filoselle noire, mince protection contre le vent du nord. (Bernanos, dans le Trésor.)
Le complément amené par la préposition de désigne des réalités bien différentes :
La protection des opprimés, de l'environnement, des consommateurs, de la jeunesse.
... se mettre sous la protection d'une église. (Guizot, dans le Trésor.)
Line Gingras
Québec
«La manipulation» : http://www.ledevoir.com/2006/10/11/120133.html
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11 octobre 2006
Comme comme
«Elle [la loi] élargit dangereusement la définition du suspect susceptible d'être considéré comme ce qu'elle désignera dorénavant comme un "ennemi combattant illégal".» (Guy Taillefer.)
... comme ce qu'elle désignera dorénavant sous la dénomination d'«ennemi combattant illégal».
... comme ce qu'elle désignera dorénavant sous le terme d'«ennemi combattant illégal».
Line Gingras
Québec
«Bush les mains libres» : http://www.ledevoir.com/2006/10/02/119513.html
04:55 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : langue française, journalisme, médias, presse
10 octobre 2006
Redoubler d'effort
«Surtout, il redouble d'effort_ pour naître au monde...» (Gérald Larose, président du Conseil de la souveraineté.)
Le Petit Robert et le Lexis, à l'article «redoubler», signalent, comme relevant de l'acception «accroître beaucoup» (Lexis), la construction redoubler ses efforts :
Le vent redouble ses efforts. (La Fontaine.)
Marie-Éva de Villers fait cependant observer que dans ce sens («montrer encore plus de»), redoubler «se construit avec la préposition de». Effectivement, selon les résultats d'une recherche Google, il serait beaucoup plus courant, aujourd'hui, d'employer le tour redoubler d'efforts (137 000 occurrences, contre 736). Celui-ci, absent du Petit Robert, du Lexis et du Multidictionnaire, figure dans le Trésor de la langue française informatisé, à l'article «redoubler»; noter le pluriel à efforts.
Line Gingras
Québec
«Michaëlle Jean a raison» : http://www.ledevoir.com/2006/09/28/119269.html
05:55 | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : langue française, orthographe, presse, médias
09 octobre 2006
Suspects terroristes
«À la même époque, des agents du FBI et de la CIA procédaient à des enlèvements de suspects terroristes...» (Gil Courtemanche.)
L'adjectif épithète qualifie le nom auquel il se rapporte. Et l'apposition, selon Brunot, «sert en réalité de qualification, comme un adjectif» (Petit Robert, à l'article «apposition».) Dans la phrase qui nous intéresse, suspects est un nom; terroristes peut être considéré, à mon avis, soit comme un adjectif épithète qui se rapporte au nom suspects, soit comme un nom en apposition.
Or, si on parlait, dans un contexte différent, de suspects terrifiés, on affirmerait que les suspects étaient terrifiés; si on disait suspects peu bavards, suspects malades, suspects étudiants, suspects citoyens des États-Unis, on avancerait que les suspects étaient peu bavards, malades, étudiants, citoyens des États-Unis. Comment peut-on écrire, dans ce cas, suspects terroristes? Une personne que l'on soupçonne seulement d'être un terroriste ne saurait, à mon sens, être présentée comme un terroriste. Cette expression ne me paraît pas cohérente.
Les gens que l'on a enlevés étaient des terroristes présumés, des personnes que l'on soupçonnait d'être des terroristes. Je crois deviner, cependant, d'où viennent les suspects terroristes : d'après Google, on trouve dans Internet plus de 900 000 occurrences de l'anglais terrorist suspects.
Line Gingras
Québec
«La tyrannie légalisée» : http://www.ledevoir.com/cgi-bin/ledevoirredir.cgi?http://...
05:40 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, anglicisme, journalisme, médias


