24 mai 2010
Refuser, mais refuser quoi?
- ... mon refus de voir Ottawa parler d'environnement en mon nom, de décider de faire la guerre en Afghanistan contre ma volonté ou de couper les vivres aux groupes de femmes pour cause d'idéologie. (Lise Payette, dans Le Devoir du 14 mai 2010.)
... mon refus [...] de décider de faire la guerre en Afghanistan contre ma volonté, vraiment? Madame Payette a plutôt voulu parler, à mon avis, de son refus de voir Ottawa décider de faire la guerre en Afghanistan contre sa volonté.
De même, en dépit de la structure qu'elle a donnée à sa phrase, elle sait parfaitement qu'il ne lui appartient pas de couper ni de refuser de couper les vivres aux groupes de femmes, même si elle peut refuser de voir Ottawa leur couper les vivres.
Je proposerais donc :
... mon refus de voir Ottawa parler d'environnement en mon nom, décider de faire la guerre en Afghanistan contre ma volonté ou couper les vivres aux groupes de femmes pour cause d'idéologie.
Line Gingras
Québec
« Le monde de l'argent a bougé » : http://www.ledevoir.com/politique/canada/288906/le-monde-de-l-argent-a-bouge
02:10 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Tags : langue française, syntaxe, journalisme, presse
23 mai 2010
À la satisfaction des deux partis
Parti ou partie.
- Par ailleurs, le bilan qu'ils [les Québécois] font des rapports entre le Québec et le reste du Canada n'a rien d'enthousiaste. Seulement 26 % des répondants estiment que depuis 30 ans, la plupart des désaccords se sont réglés « à la satisfaction des deux partis ». (Lysiane Gagnon citant un sondage CROP, dans La Presse du 20 mai 2010.)
Il ne s'agit pas de partis politiques, mais de gouvernements qui sont des parties à des négociations.
Line Gingras
Québec
« Trente ans plus tard... » : http://www.cyberpresse.ca/chroniqueurs/lysiane-gagnon/201005/19/01-4282069-trente-ans-plus-tard.php?utm_categorieinterne=trafficdrivers&utm_contenuinterne=cyberpresse_meme_auteur_4282459_article_POS1
04:15 Publié dans Cultiver le doute, On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Tags : langue française, orthographe, journalisme, presse
22 mai 2010
Le test, les futurs profs et les maux de tête
- Le Test de certification en français écrit pour l'enseignement (TECFEE) – obligatoire pour tous les futurs profs depuis l'automne – causent bien des maux de tête... (Daphnée Dion-Viens, dans Le Soleil du 21 mai 2010.)
D'après la construction de la phrase, ce ne sont pas les futurs profs qui causent des maux de tête (quoique...), mais un certain test : cause.
Line Gingras
Québec
« Examen de français : sanctions allégées pour les futurs profs qui échouent » : http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/actualites/education/201005/20/01-4282504-examen-de-francais-sanctions-allegees-pour-les-futurs-profs-qui-echouent.php
02:29 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Tags : langue française, grammaire, journalisme, presse
21 mai 2010
Je démissionnerai à compter de vendredi
- ... le directeur du renseignement américain Dennis Blair a démissionné [...] jeudi [...]
« C'est avec un profond regret que j'ai informé le président aujourd'hui que je démissionnerai de mon poste [...] à compter du vendredi 28 mai », a annoncé dans un communiqué M. Blair... (Daphné Benoît, AFP, dans Cyberpresse, 20 mai 2010.)
A démissionné? Démissionnera? Quoi qu'il en soit, le geste de démissionner ne s'étire pas sur plusieurs jours, à compter de telle date, mais se pose à une date précise. Je suggérerais :
... le directeur du renseignement américain, Dennis Blair, a démissionné [...] jeudi [...]
« C'est avec un profond regret que j'ai informé le président aujourd'hui que je quitterai mon poste [...] le vendredi 28 mai »...
Line Gingras
Québec
« Le patron du renseignement américain annonce sa démission » : http://www.cyberpresse.ca/international/etats-unis/201005/20/01-4282457-le-patron-du-renseignement-americain-annonce-sa-demission.php?utm_categorieinterne=trafficdrivers&utm_contenuinterne=cyberpresse_B4_manchettes_231_accueil_POS3
01:42 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Tags : langue française, traduction, journalisme, presse
20 mai 2010
La seule porte...
- Ces lacunes forcent les patients à se tourner en masse vers les hôpitaux, la plupart du temps en passant par la seule porte qui leur reste : celles des urgences. (Louise-Maude Rioux Soucy, dans Le Devoir du 20 mai 2010.)
Le pronom démonstratif ne remplace pas les urgences, mais la seule porte : celle...
Line Gingras
Québec
« Cancer : constat d'échec dans les soins palliatifs » : http://www.ledevoir.com/societe/sante/289310/cancer-constat-d-echec-dans-les-soins-palliatifs
08:43 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Tags : langue française, journalisme, presse, médias
19 mai 2010
Un accident évacué en ambulance
- Prétexte : 21 accidents dans le circuit l'an dernier, dont un qu'on a dû évacuer en ambulance. (Pierre Foglia, dans La Presse du 18 mai 2010.)
Le pronom relatif dont ne peut avoir pour antécédent que le nom accidents; mais on n'évacue pas des accidents, cela va de soi. Je suggérerais :
Prétexte : 21 accidents dans le circuit l'an dernier, dont un qui a nécessité l'appel d'une ambulance.
Prétexte : 21 accidents dans le circuit l'an dernier; un blessé qu'on a dû évacuer en ambulance.
(Faudrait-il mettre, ici, prétexte au pluriel? Je ne le pense pas : le second élément demeure une précision.)
Line Gingras
Québec
« Pas d'affaire dans le trafic » : http://www.cyberpresse.ca/chroniqueurs/pierre-foglia/201005/17/01-4281335-pas-daffaire-dans-le-trafic.php?utm_categorieinterne=trafficdrivers&utm_contenuinterne=cyberpresse_B13b_pierre-foglia_3264_section_POS1
07:20 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Tags : langue française, syntaxe, journalisme, presse
18 mai 2010
Stratégie en matière de la santé
En matière de, en matière de la, en matière du, en matière des; en matière de + article; syntaxe du français.
- ... la décision d'exclure l'avortement de la contribution financière canadienne à la future stratégie du G8 en matière de la santé maternelle et infantile. (Marco Bélair-Cirino, dans Le Devoir du 17 mai 2010.)
D'après le résultat de mes recherches, le complément introduit par la locution prépositive en matière de n'est jamais précédé d'un article :
En matière de sport. (Multidictionnaire.)
George la très-pieuse est imbattable en matière de religion. (Sarrazin, dans le Lexis.)
En matière d'art, j'avoue que je ne hais pas l'outrance. (Baudelaire, dans le Petit Robert.)
Il convint qu'en matière de défense nationale les économies sur la qualité pouvaient être néfastes, et même criminelles. (Romains, dans le Trésor de la langue française informatisé. Cet ouvrage donne plusieurs autres exemples.)
Il fallait écrire :
... la future stratégie du G8 en matière de santé maternelle et infantile.
J'ai consulté aussi le Hanse-Blampain, le Colin, le Girodet, le Thomas et le Berthier-Colignon, où je n'ai cependant rien trouvé d'utile.
Line Gingras
Québec
« Sortie pro-vie de Mgr Ouellet – Des propos dignes d'une autre époque » : http://www.ledevoir.com/societe/ethique-et-religion/289116/sortie-pro-vie-de-mgr-ouellet-des-propos-dignes-d-une-autre-epoque
04:20 | Lien permanent | Tags : langue française, syntaxe, journalisme, presse
17 mai 2010
En l'occurence
En l'occurence ou en l'occurrence; orthographe.
- Selon les conventions internationales, la Libye doit diriger l'enquête, à laquelle participe le pays constructeur de l'appareil de la compagnie libyenne Al Afriqiyah, en l'occurence la France. (Imed Lamloum, AFP, dans Cyberpresse, 13 mai 2010.)
En l'occurrence prend deux c (enfin, trois au total) et deux r. C'est facile à vérifier...
Line Gingras
Québec
« Crash en Libye : le miraculé récupère bien » : http://www.cyberpresse.ca/international/afrique/201005/13/01-4280079-crash-en-libye-le-miracule-recupere-bien.php
12:09 Publié dans Cultiver le doute, On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Tags : langue française, orthographe, journalisme, presse
16 mai 2010
Son rôle consiste de formuler des recommandations
- Le rôle du commissaire à la santé consiste à juger la performance du système de santé québécois et de formuler des recommandations au gouvernement. (PC, dans Le Devoir du 13 mai 2010.)
Ne perdons pas le fil :
Le rôle du commissaire à la santé consiste à juger la performance du système de santé québécois et à formuler des recommandations au gouvernement.
Line Gingras
Québec
« Le commissaire à la santé condamne le projet de franchise santé » : http://www.ledevoir.com/politique/quebec/288890/le-commissaire-a-la-sante-condamne-le-projet-de-franchise-sante
01:51 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Tags : langue française, syntaxe, journalisme, presse
15 mai 2010
Closes de sécurité d'emploi
- « Mais devant le refus persistant des représentants syndicaux et l'existence de closes de sécurité d'emploi... » (Alexandre Shields citant Pierre Karl Péladeau, dans Le Devoir du 13 mai 2010.)
... l'existence de clauses de sécurité d'emploi...
Line Gingras
Québec
« Péladeau : un passage obligé » : http://www.ledevoir.com/economie/actualites-economiques/288846/peladeau-un-passage-oblige
06:52 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Tags : langue française, journalisme, presse, médias
14 mai 2010
Sens devant derrière, sens dessus dessous
- ... l'examen d'aptitude du Conseil médical du Canada [...] comporte toujours des erreurs de syntaxe et de traduction qui alourdissent le sens, quand il ne le change pas carrément. (Lisa-Marie Gervais, dans Le Devoir du 14 mai 2010.)
Il? Ce n'est pas l'examen qui change le sens, mais les erreurs de syntaxe et de traduction. Dans un autre ordre d'idées, je ne vois pas comment de telles erreurs pourraient alourdir le sens; elles alourdissent plutôt la phrase :
... l'examen d'aptitude du Conseil médical du Canada [...] comporte toujours des erreurs de syntaxe et de traduction qui alourdissent la phrase, quand elles ne changent pas carrément le sens.
... l'examen d'aptitude du Conseil médical du Canada [...] comporte toujours des erreurs de syntaxe et de traduction qui obscurcissent le sens, quand elles ne le changent pas carrément.
Line Gingras
Québec
« Éducation – Un important examen de médecine souffre de traduction infidèle » : http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/288944/education-un-important-examen-de-medecine-souffre-de-traduction-infidele
05:54 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Tags : langue française, journalisme, presse, médias
13 mai 2010
Liseurs de bonne aventure
Liseuse de bonne aventure; liseur de bonne aventure; liseuses de bonne aventure; liseurs de bonne aventure; diseuse de bonne aventure; diseur de bonne aventure; diseuses de bonne aventure; diseurs de bonne aventure.
- ... les astrologues, les liseurs de bonne aventure, les devins qui voient l'avenir dans les entrailles des poulets... (Patrick Lagacé, dans La Presse du 23 avril 2010.)
Je n'ai pas trouvé liseur de bonne aventure dans les ouvrages consultés (j'ai vu le Petit Robert, le Lexis, le Multidictionnaire et le Trésor de la langue française informatisé aux articles « liseur », « diseur » et « aventure »), mais diseur de bonne aventure, dire la bonne aventure. Le Trésor donne les exemples suivants :
Je me connais en chiromancie, j'ai dit souvent la bonne aventure. (Balzac.)
Un ton de diseuse de bonne aventure. (France.)
Dès qu'un diseur de bonne aventure vous explique minutieusement les faits connus de vous seul, dans votre vie antérieure, il peut vous dire les événements que produiront les causes existantes. (Balzac.)
[...] cette folie endémique qui [...] a remis en crédit, chez le peuple le plus éclairé, dans la première ville du monde, les sorcières et les diseuses de bonne aventure... (Jouy.)
Il fallait écrire :
... les astrologues, les diseurs de bonne aventure...
Line Gingras
Québec
« L'esprit troué » : http://www.cyberpresse.ca/chroniqueurs/patrick-lagace/201004/23/01-4273354-lesprit-troue.php
05:35 Publié dans Cultiver le doute | Lien permanent | Tags : langue française, journalisme, presse, médias
12 mai 2010
Des négociations ont transpiré ceci
- Des négociations qui se sont poursuivies au cours des derniers jours ont transpiré ceci : les conservateurs se disent enclins à organiser un référendum sur le sujet... (Serge Truffaut, dans Le Devoir du 12 mai 2010.)
Transpirer ne veut pas dire « faire paraître au jour, finir par faire connaître », mais « paraître au jour, finir par être connu ». (Petit Robert.) Dans cet emploi figuré, le verbe n'admet pas de complément d'objet direct.
Les négociations ne transpirent pas ceci, soit le fait que les conservateurs se disent enclins à organiser un référendum; c'est plutôt ceci qui transpire des négociations :
Des négociations qui se sont poursuivies au cours des derniers jours a transpiré ceci : les conservateurs se disent enclins à organiser un référendum sur le sujet...
Les négociations qui se sont poursuivies au cours des derniers jours ont laissé transpirer ceci [= ont laissé ceci transpirer] : les conservateurs se disent enclins à organiser un référendum sur le sujet...
Line Gingras
Québec
« Brown passe le relais à Cameron – La carpe et le lapin » : http://www.ledevoir.com/international/europe/288770/brown-passe-le-relais-a-cameron-la-carpe-et-le-lapin
04:57 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Tags : langue française, syntaxe, grammaire, journalisme
11 mai 2010
Cette dernière
Cette dernière, ces dernières, ce dernier, ces derniers.
- Si, depuis 1996, une politique oblige les diffuseurs à offrir une programmation diversifiée pour recevoir des subventions du ministère de la Culture, cette dernière est demeurée bien floue sur les façons d'y parvenir. (Isabelle Paré, dans Le Devoir du 17 avril 2010.)
À quoi devrait renvoyer cette dernière? Au nom féminin singulier le plus proche parmi ceux qui précèdent, en toute logique. Et pourtant, je ne pense pas que la culture soit demeurée floue; il ne me semble pas non plus qu'une programmation puisse demeurer floue, ou non, sur les façons d'offrir... une programmation. Qu'est-ce donc qui est demeuré flou? Parions que c'est la politique dont il est question au début de la phrase :
Si, depuis 1996, une politique oblige les diffuseurs à offrir une programmation diversifiée pour recevoir des subventions du ministère de la Culture, elle est demeurée bien floue sur les façons d'y parvenir.
Depuis 1996, une politique oblige les diffuseurs à offrir une programmation diversifiée pour recevoir des subventions du ministère de la Culture; elle est demeurée bien floue, cependant, sur les façons d'y parvenir.
* * * * *
-
Pour ce mordu de la scène qui a longtemps veillé aux destinées de la salle de spectacle de Carleton, en Gaspésie, le délicat art de la diffusion consiste à...
... l'art délicat de la diffusion consiste à...
Line Gingras
Québec
« Quand l'humour fait la loi, les régions ne rigolent plus » : http://www.ledevoir.com/culture/actualites-culturelles/287122/quand-l-humour-fait-la-loi-les-regions-ne-rigolent-plus
04:20 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Tags : langue française, syntaxe, journalisme, presse
10 mai 2010
Dépenses somptueuses, dépenses somptuaires
Dépenses somptuaires; dépenses somptueuses; dépense somptuaire; dépense somptueuse.
- L'avocat qui représente la FTQ-Construction dans la présumée fraude de l'ex-directeur général Jocelyn Dupuis serait lui-même mêlé aux dépenses somptueuses de l'ex-syndicaliste, a appris Le Devoir. (Kathleen Lévesque, dans Le Devoir du 4 mai 2010.)
Mardi 4 mai, 16 h, on sonne, j'ouvre d'en haut : ce beau jeune homme sympathique qui grimpe l'escalier, c'est le photographe du Devoir à Québec, Yan Doublet; je fais partie de la cinquantaine de lecteurs dont on va tracer le portrait au cours de l'année, pour marquer le centenaire du journal. (Les articles de la série, intitulée « Le Devoir, c'est moi », sont publiés tous les lundis.) Déjà, il y a quelques semaines, Pauline Gravel m'a appelée pour l'entretien téléphonique; aujourd'hui, on s'occupe de la photo – et je ne sais lequel aura eu la tâche la plus ardue, de la rédactrice devant tirer des propos sensés de mon bafouillage ou du photographe chargé de présenter ma bouille, désespérément non photogénique.
Un détail important complique le travail de monsieur Doublet : abonnée à la version électronique, je ne lis Le Devoir qu'à l'ordinateur; la photo doit être prise dans mon bureau. Mon visiteur se sert d'un miroir (normalement accroché au-dessus de l'évier de la cuisine), essaie plusieurs angles; relève un abat-jour qui gêne, place et déplace des dictionnaires pour équilibrer les couleurs. À l'écran, le site du Devoir semble un peu austère; nous utiliserons la version pdf, beaucoup plus colorée. Et là, tandis que nous causons agréablement pendant la prise de nouveaux clichés, je m'interroge sur le chapeau et la première phrase de l'article de madame Lévesque : des dépenses somptueuses, est-ce correct? Ne dit-on pas plutôt somptuaires? Justement, j'ai la main droite sur le Multidictionnaire; les doigts me démangent... Monsieur Doublet parti, je vais tirer cette question au clair.
D'après le Petit Robert, somptueux signifie « qui a nécessité de grandes dépenses » et, par extension, « qui est d'une beauté coûteuse, d'un luxe visible extrême ». J'ai relevé les exemples suivants dans les ouvrages consultés :
Une réception, un cadeau, un décor, une fête, un dîner, une résidence, un palais, des demeures, des vêtements, des étoffes, des tapisseries, un train de vie somptueux.
De toute évidence, on ne saurait parler de dépenses somptueuses. Qu'en est-il de dépenses somptuaires?
L'adjectif a voulu dire autrefois « relatif aux dépenses ». Par la suite, sous l'influence de somptueux, il a connu des glissements de sens, si bien que l'expression dépense somptuaire est admise sans réserve dans le Lexis (1977), avec la définition « dépense excessive, purement destinée au luxe » :
Dépense somptuaire et voluptuaire. (Valéry.)
Cet emploi est souvent considéré comme un pléonasme, en raison du sens premier de l'adjectif. L'Encyclopédie du bon français dans l'usage contemporain, publiée en 1972, fait cependant observer : « L'expression dépense somptuaire [...] signifie "dépense excessive faite pour acquérir des objets de luxe, des objets superflus". Elle a été blâmée par les puristes comme constituant un pléonasme affreux. Il n'en reste pas moins que somptuaire amène avec lui l'idée de luxe, de superflu qui n'est pas dans dépense et l'idée de dépense excessive qui n'est pas dans somptueux. »
L'expression dépense somptuaire est condamnée par Thomas, Girodet, Berthier et Colignon. Marie-Éva de Villers signale qu'elle est critiquée, mais courante; Hanse et Blampain paraissent la déconseiller, tout en reconnaissant qu'elle est attestée chez d'excellents écrivains.
Je lis dans le Dictionnaire historique de la langue française de la maison Robert : « Par confusion avec somptueux et parce que les lois somptuaires s'appliquaient aux dépenses de luxe, l'adjectif s'emploie aujourd'hui pour "de luxe", par exemple dans [...] dépenses somptuaires, courant malgré les critiques des puristes contre cette extension. »
Le Trésor de la langue française informatisé donne de « luxe » la définition suivante : « Pratique sociale caractérisée par des dépenses somptuaires... » (C'est moi qui souligne.)
Il me semble qu'il ne faut pas être plus catholique que le pape. Bien entendu, on peut parler, selon le contexte, de dépense excessive, exagérée, fastueuse, de prestige, d'apparat. Mais s'il faut refuser dépense somptueuse, je suis d'avis qu'il convient d'accepter dépense somptuaire :
L'avocat qui représente la FTQ-Construction dans la présumée fraude de l'ex-directeur général Jocelyn Dupuis serait lui-même mêlé aux dépenses somptuaires de l'ex-syndicaliste, a appris Le Devoir.
Line Gingras
Québec
« Des festins pour l'avocat de la FTQ-Construction » : http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/288312/des-festins-pour-l-avocat-de-la-ftq-construction
« Le Devoir, c'est moi - Exercice linguistique pour passionnée des mots » : http://www.ledevoir.com/societe/medias/288693/le-devoir-c-est-moi-exercice-linguistique-pour-passionnee-des-mots
07:12 Publié dans Cultiver le doute | Lien permanent | Tags : langue française, journalisme, presse, médias
09 mai 2010
Il réfléchit, et ne fléchit pas
- On lui a laissé plusieurs mois pour réfléchir. Mais il n'a pas fléchi. (Christiane Desjardins, dans La Presse du 5 mai 2010.)
Je suggérerais :
On lui a laissé plusieurs mois pour réfléchir. Mais il n'a pas cédé.
Line Gingras
Québec
« Meurtre sans cadavre : le tueur refuse de dire où est le corps »
(Cet article a été corrigé après la publication.)
03:43 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Tags : langue française, journalisme, presse, médias
08 mai 2010
Ils ne m'ont pas parlée
Accord du participe passé employé avec l'auxiliaire avoir; grammaire française; orthographe d'accord.
- Ils ne m’ont pas parlée [...] Ils ne m’ont tout simplement pas parlée. (Taïeb Moalla citant la ministre Julie Boulet, dans Le Journal de Québec du 7 mai 2010.)
Le participe passé employé avec l'auxiliaire avoir s'accorde avec le complément d'objet direct, si ce dernier précède le verbe. Dans le cas du verbe parler, toutefois, on ne pose pas la question « ils ont parlé qui? », mais « ils ont parlé à qui? ». Le pronom personnel m' est donc complément d'objet indirect, et ne commande pas l'accord :
Ils ne m'ont pas parlé [...] Ils ne m'ont tout simplement pas parlé.
Line Gingras
Québec
« Les intrigues du Parlement » : http://lejournaldequebec.canoe.ca/journaldequebec/politique/provinciale/archives/2010/05/20100507-195936.html
00:14 Publié dans Cultiver le doute, On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Tags : langue française, grammaire, orthographe, journalisme
07 mai 2010
Une proposition qu'une école peut s'en inspirer
Que, en, dont; syntaxe.
- ... cet examen est une proposition du ministère qu'une école peut choisir de faire passer dans son intégralité à la date prescrite ou s'en inspirer pour créer un examen maison... (Lisa-Marie Gervais, dans Le Devoir du 6 mai 2010.)
On ne dirait pas : « L'affaire que je t'en parle », mais : « L'affaire dont je te parle. »
On n'écrirait pas non plus : « ... cet examen est une proposition du ministère qu'une école peut [ou peut choisir de] s'en inspirer », mais : « ... cet examen est une proposition du ministère dont une école peut [ou peut choisir de] s'inspirer. » Je conseillerais donc :
... cet examen est une proposition du ministère qu'une école peut choisir de faire passer dans son intégralité à la date prescrite ou dont elle peut s'inspirer pour créer un examen maison...
Line Gingras
Québec
« Premier grand test des enfants de la réforme » : http://www.ledevoir.com/societe/education/288440/premier-grand-test-des-enfants-de-la-reforme
04:34 | Lien permanent | Tags : langue française, syntaxe, journalisme, presse
06 mai 2010
Lorsque bébé est né...
- Lorsque bébé est né, maman l'a allaité et attend le jour où elle pourra cesser de le faire sans lui causer de traumatismes profonds... (Brigitte Breton, dans Le Soleil du 5 mai 2010.)
Lorsque bébé est né, maman [...] attend le jour...? Bien sûr que non. Pour éviter que la proposition subordonnée complément circonstanciel de temps se rattache à maman attend le jour, il faut bien séparer cette dernière proposition de la précédente, maman l'a allaité :
Lorsque bébé est né, maman l'a allaité; elle attend le jour où elle pourra cesser de le faire sans lui causer de traumatismes profonds...
Line Gingras
Québec
« Dangereux petit écran » : http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/opinions/editoriaux/201005/04/01-4277150-dangereux-petit-ecran.php?utm_source=Bulletin%20CBP_Soleil&utm_medium=email
02:53 | Lien permanent | Tags : langue française, syntaxe, journalisme, presse
05 mai 2010
Avoir court
Avoir court ou avoir cours; orthographe.
- Le débat qui a court depuis quelques jours... (Jean-Marc Léger, dans Le Devoir du 3 mai 2010.)
La locution verbale s'écrit avoir cours :
Le débat qui a cours...
Line Gingras
Québec
« Lettres – Le gouverneur général » : http://www.ledevoir.com/politique/canada/288323/lettres-le-gouverneur-general
06:54 Publié dans Cultiver le doute, On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Tags : langue française, orthographe, presse, médias
04 mai 2010
Les libertés se seraient adressées aux tribunaux?
- Il a tenu tête aux journalistes, à l'opposition, aux groupes de défense des libertés civiles qui se sont adressées aux tribunaux en 2007... (Manon Cornellier, dans Le Devoir du 28 avril 2010.)
Ce ne sont certainement pas les libertés civiles qui se sont adressées aux tribunaux, mais les groupes de défense des libertés civiles : adressés.
Line Gingras
Québec
« Compromis nécessaire » : http://www.ledevoir.com/politique/canada/287876/compromis-necessaire
01:36 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Tags : langue française, grammaire, journalisme, presse