03 avril 2007
À l'aulne de
« Celui qui a la tâche titanesque de faire la promotion de la souveraineté à l'extérieur du cadre péquiste, Gérald Larose, pense lui aussi que tous les enjeux doivent être "traités systématiquement à l'aulne du projet à construire". » (Clairandrée Cauchy.)
D'après ce que je vois dans le Petit Robert, le Lexis et le Hanse-Blampain, on appelle un aulne ou un aune l'arbre « qui croît dans les lieux humides » (Petit Robert) :
L'aulne est l'arbre des eaux mortes et sombres. C'est la seule silhouette verticale qui peuple les plaines brumeuses du nord. (Tournier.)
L'ancienne mesure de longueur s'écrit cependant une aune, sans l :
Ce manteau a deux manches, longues d'environ une aune. (Baudelaire, dans le Lexis.)
Tirant une langue d'une aune. (France, dans le Petit Robert.)
Quand le vieux Schulz rentra, la figure longue d'une aune, et qu'il apprit de Salomé, qui venait aussi de rentrer, ce qui s'était passé, il fut dans la désolation : il faillit pleurer. (Rolland, dans le Trésor de la langue française informatisé.)
Mesurer les autres à son aune. (Petit Robert, Lexis et Trésor.)
Line Gingras
Québec
« La souveraineté peut-elle survivre? » : http://www.ledevoir.com/2007/03/31/137743.html
03:58 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : langue française, orthographe, journalisme, presse
02 avril 2007
Il est normal que, il est juste que + indicatif
« Comme s'il était normal et juste que le garçon qui attendait patiemment son tour pour jouer dans le grand club se voit donner l'occasion de démontrer enfin ses talents. » (Gil Courtemanche.)
Le Trésor de la langue française informatisé, aux articles « normal » et « juste », signale que les tours il est normal que et il est juste que sont suivis du subjonctif :
Comme le fait fut observé par des généticiens, il était normal qu'il fût interprété en terme génétique. (P. Morand.)
C'est le chat qui pense et qui agit, et il n'est que juste que ce chat soit, comme la chienne Pouffe, un être céleste. (France.)
Selon Wagner et Pinchon, on se sert du subjonctif « toutes les fois que dans un énoncé la prise en considération d'un fait, l'interprétation d'un fait l'emportent sur l'actualisation de ce fait ». Il me paraît imprudent de généraliser, mais je dirais que le subjonctif convient très souvent à l'expression d'un jugement, d'un sentiment, d'une volonté :
Il est utile que vous le fassiez le plus tôt possible. (Grevisse.)
Dans la phrase à l'étude, on a employé le présent de l'indicatif, voit, au lieu du présent du subjonctif, voie; il suffit de remplacer le verbe voir par le verbe avoir, qui ne se prononce pas de la même façon aux deux modes, pour se rendre compte que le subjonctif s'imposait :
Comme s'il était normal et juste que le garçon qui attendait patiemment son tour pour jouer dans le grand club ait l'occasion de démontrer enfin ses talents.
Line Gingras
Québec
« Jetables et remplaçables » : http://www.ledevoir.com/2007/03/31/137695.html
08:10 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, orthographe, journalisme
01 avril 2007
Le voilà qu'il, le voici qu'il
« Reconnu comme un grand orgueilleux hautain, le voilà qu'il faisait son mea-culpa... » (Antoine Robitaille.)« Le voilà qu'il incarne le centre, lieu convoité entre tous par tout politicien occidental. »
Colin, Thomas, Girodet, Berthier et Colignon signalent que l'on peut très bien écrire le voici qui vient ou voici qu'il vient, le voilà qui arrive ou voilà qu'il arrive, mais qu'il faut éviter le tour redondant le voici qu'il vient, le voilà qu'il arrive :
Voici qu'il vient ou Le voici qui vient. (Hanse et Blampain.)
Voici qu'il commence à comprendre que. (Gide, dans le Petit Robert.)
Les voici qui arrivent, ce sont eux. (Petit Robert.)
Le voici qui rature [...] des pages imaginaires. (Maurois, dans le Petit Robert.)
Le voilà qui prend tout à coup le mors aux dents. (Diderot, dans le Petit Robert.)
Le voici qui monte enfin l'escalier. (Supervielle, dans le Colin.)
Le voilà qui se met à développer ce texte... (Chênedollé, dans le Trésor de la langue française informatisé.)
La voici qui s'avance, son livre de prières à la main. (Musset, dans le Trésor.)
Le voici qui se détourne en marchant. (Bazin, dans le Trésor.)
Jean-Paul Colin « s'étonne de trouver sous la plume de Valéry » :
* Le voici qu'il ne peut plus se contenir dans l'étendue.
Line Gingras
Québec
« Du tumulte à l'espoir » : http://www.ledevoir.com/2007/03/24/136579.html
01:40 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, journalisme
31 mars 2007
Hocher de la tête
« À la description du programme de l'ADQ, mes interlocuteurs hochaient de la tête et se sentaient en terrain connu. » (Christian Rioux.)
Le Petit Robert, le Multidictionnaire, le Lexis et le Trésor de la langue française informatisé donnent hocher pour un verbe transitif et reçoivent la locution hocher la tête, sans de :
Il hocha silencieusement la tête de droite à gauche, comme s'il se refusait quelque chose. (Hugo, dans le Petit Robert.)
Elle hochait la tête, pensive et maléfique. (Pagnol, dans le Lexis.)
Le capitaine hocha la tête d'un air buté. (Gracq, dans le Lexis.)
Les deux ruraux hochaient la tête en signe de refus. (Maupassant, dans le Trésor.)
Jerphanion écoutait sans interrompre, hochant la tête d'un air de compréhension sympathique. (Romains, dans le Trésor.)
M. Rambout hocha la tête; mais je ne sus pas si c'était en signe d'incrédulité ou d'admiration. (Bosco, dans le Trésor.)
... je devais la voir à une soirée donnée par Gilberte [...] hochant la tête, serrant la bouche... (Proust, dans le Trésor.)
Le Trésor relève aussi l'emploi intransitif, hocher de la tête (Académie 1935). Il n'en propose cependant pas d'exemple.
Line Gingras
Québec
« Vu d'ailleurs » : http://www.ledevoir.com/2007/03/30/137525.html
01:49 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, journalisme
30 mars 2007
Manquer quelqu'un
« Le Bloc québécois va le manquer. Il était bien plus que le numéro deux du Bloc. Il en était le pilier. Celui sur lequel un chef peut compter pour ternir le fort quand il doit s’abstenter. » (Michel C. Auger.)
D'après les quatre ouvrages québécois que j'ai consultés, soit le Multidictionnaire, le Chouinard, le Colpron et le Dagenais, on commet un anglicisme en employant manquer quelqu'un ou quelque chose dans le sens de « regretter son absence ».
Pour rendre l'idée qu'un homme s'est ennuyé d'une femme, on dit en anglais he missed her; mais en français, le sujet du verbe manquer doit être la personne (ou la chose) absente, et le complément doit répondre à la question à qui : Elle lui a manqué (et non pas il l'a manquée). Voyez encore ces exemples du Petit Robert :New York leur manqua comme sa drogue à un intoxiqué. (Maurois.)
Ses enfants lui manquent.
Le calque de structure, fréquent dans l'Outaouais québécois et ontarien, peut être cause de malentendus : ainsi que le fait observer Dagenais, vous me manquez beaucoup n'est pas synonyme de je vous manque beaucoup, qui signifie normalement « vous vous ennuyez beaucoup de moi ».
La phrase à l'étude aurait pu se lire :
Le Bloc québécois va le regretter.
Line Gingras
Québec
« Michel Gauthier » : http://blogues.cyberpresse.ca/mcauger/?p=606140889#more-6...
06:20 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, anglicisme, journalisme
29 mars 2007
Ils se sont échangés des propos
« L'assistante chiropraticienne et le chauffeur se sont alors échangés des propos aigres-doux... » (PC.)
D'après ce que j'ai vu dans les onze ouvrages consultés - aux articles « échanger » et « propos » -, le verbe échanger, au sens de « se faire des envois, des communications réciproques de (choses du même genre) » (Petit Robert), s'utilise à la forme active :
Ils ont échangé des lettres. (Petit Robert.)
Échanger des sourires, des idées, des injures. (Trésor de la langue française informatisé.)
Elles échangèrent un flamboyant regard. (Zola, dans le Trésor.)
Nous avons échangé nos points de vue. (Lexis.)
Ils déjeunèrent en tête à tête, échangèrent leurs manières de voir... (Maupassant, dans le Trésor.)
On échangeait à table, ou après dîner, dans les coins, des expressions très peu propres à former l'oreille d'une enfant. (Boylesve, dans le Colin.)
Échanger des propos. (Petit Robert, Trésor.)
Ils ont échangé quelques propos anodins. (Multidictionnaire.)
Il a échangé avec moi quelques propos. (Hanse-Blampain.)
C'est uniquement avec pour sujet un nom de chose désignant ce qui est échangé que je l'ai rencontré à la forme pronominale; il s'agissait donc d'un pronominal passif :
Notre conversation s'échangeait de châlit à châlit. (Hériat, dans le Colin.)
Leurs propos s'échangèrent à voix basse. (Toepffer, dans le Trésor.)
L'emploi du pronominal réciproque, dans la phrase à l'étude, me semble abusif; si l'on tenait absolument à le conserver, il faudrait en tout cas laisser le participe passé invariable, étant donné qu'il y a un complément d'objet direct (ils ont échangé quoi? des propos) et que celui-ci est placé après le verbe.
Je trouve plus simple d'écrire :
L'assistante chiropraticienne et le chauffeur ont alors échangé des propos aigres-doux...
Line Gingras
Québec
« Une passagère est expulsée d'un autobus pour la seconde fois en une semaine » : http://www.ledevoir.com/nouvelles-en-continu.html#ID:2038...
06:10 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, orthographe, journalisme
28 mars 2007
Les soupçons qui pèsent contre elle
« Même s'ils avaient en poche un accord avec Québec, les avocats de Myriam Bédard devraient encore convaincre les autorités américaines d'accepter l'entente lors d'une audition, prévue pour vendredi, portant sur les soupçons de rapt d'enfant qui pèsent contre elle. » (PC.)
Faut-il écrire qui pèsent sur ou qui pèsent contre? Sur les onze ouvrages consultés, trois seulement fournissent des exemples utiles :
Soupçon, accusation qui pèse sur quelqu'un, qui le concerne, le vise. (Lexis.)
Comment pouvez-vous faire peser sur moi un aussi injurieux soupçon? (Hébert, dans le Lexis.)
Je me rends parfaitement compte des soupçons qui pèsent sur moi. (Leroux, dans le Trésor de la langue française informatisé.)
Les charges qui pèsent sur lui sont accablantes. (Petit Robert.)
Personne n'ignorait que des charges accablantes pesaient sur un garçon boucher de dix-neuf ans, nommé Lecœur. (A. France, dans le Trésor.)
Toutes les anciennes charges qui pesaient contre Dreyfus s'évanouissent à l'examen. (Martin du Gard, 1913, dans le Trésor. Le jugement prononcé contre Dreyfus a été cassé en 1906.)
À la lumière de ce qui précède, je conseillerais (sans trop insister) d'écrire les soupçons qui pèsent sur elle plutôt que les soupçons qui pèsent contre elle. Dans la phrase de Martin du Gard, ci-dessus, l'emploi de contre pourrait s'expliquer par le fait que les anciennes charges qui pesaient contre Dreyfus avaient entraîné, plusieurs années auparavant, la condamnation de l'accusé. Dans la phrase à l'étude, la préposition sur donnerait à l'énoncé un ton plus neutre qui me paraît approprié.
Line Gingras
Québec
« Les avocats de Myriam Bédard cherchent à s'entendre avec Québec » : http://www.ledevoir.com/2006/12/28/125983.html
05:20 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, journalisme
27 mars 2007
Tourner au ridicule
« L'idée? Tourner au ridicule le Directeur général des élections parce que les femmes voilées pourront théoriquement voter sans se dévoiler le visage. » (Pierre Cayouette.)
Le Petit Robert, le Multidictionnaire, le Lexis et le Trésor de la langue française informatisé ne consignent, à l'article « ridicule », que la locution tourner (quelqu'un ou quelque chose) en ridicule :
Il se laisse tourner en ridicule devant toutes les femmes des notables. (Vailland, dans le Lexis.)
Je tâche d'y tourner le vice en ridicule... (La Fontaine, dans le Trésor.)
Line Gingras
Québec
« Niqab : on passe à un autre appel... » : http://forums.lactualite.com/advansis/?mod=for&act=di...
03:17 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, journalisme, presse, médias
26 mars 2007
Son approche à la question
« Un phénomène, l'Action démocratique? Sans doute, surtout si on tient compte du relatif anonymat et de l'inexpérience de son équipe, de l'ambiguïté persistant autour de son programme et de son approche à la sempiternelle question nationale. » (Jean Dion.)
D'après ce que j'ai pu voir dans les onze ouvrages consultés, le substantif approche, au sens de « manière d'aborder un sujet, un problème » (Lexis), « façon d'aborder une question quant au point de vue et à la méthode » (Hanse-Blampain), introduit toujours son complément au moyen de la préposition de :
Cet ouvrage est simplement une approche de la question. (Lexis.)
L'approche sociologique d'une étude littéraire. (Petit Robert.)
Les nouvelles approches de la littérature. (Colin.)
Une nouvelle approche de la littérature classique. (Girodet.)
Serait-il réélu? À l'échelle du canton ce serait une bataille d'approche de l'élection législative... (Aragon, dans le Trésor de la langue française informatisé.)
Line Gingras
Québec
« Le phénomène ADQ » : http://www.ledevoir.com/2007/03/24/136574.html
06:42 | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, journalisme
25 mars 2007
Inspirer quelqu'un à faire quelque chose
« Mais pour cela, il faut du temps. Du temps pour les jeunes femmes de terminer leurs études. Acquérir des compétences. Et en inspirer d'autres à faire comme elles. » (Agnès Gruda.)
« ... M. Cameron a fait un discours important disant qu’on "ne peut pas intimider les gens jusqu’à ce qu’ils se sentent Britanniques, nous devons les inspirer à le devenir". » (Michel C. Auger.) [« We can't bully people into feeling British - we have to inspire them. »]
Selon les dictionnaires généraux que j'ai sous la main, quelque chose ou quelqu'un peut inspirer quelqu'un ou quelque chose, ou inspirer quelque chose à quelqu'un :
Les paysages de Provence ont beaucoup inspiré Cézanne. (Petit Robert.)
Les intentions qui inspirent un acte. (Petit Robert.)
Elle savait n'avoir jamais inspiré qu'une admiration respectueuse et craintive. (Blais, dans le Lexis.)
Cette scène inspire du chagrin à Nadia. (Multidictionnaire.)
La République ne lui inspirait que du dégoût. (Beauvoir, dans le Lexis.)
Le projet lui fut inspiré par un conseiller bien intentionné, mais maladroit. (Lexis.)
... elle vous inspire une poésie exquise et vraie qui remplit vos lettres. (Hugo, dans le Trésor de la langue française informatisé.)
On peut aussi s'inspirer de quelque chose pour + infinitif :
Il s'est manifestement inspiré de la traduction pour faire cette version latine. (Lexis.)
Le Trésor signale inspirer de + infinitif :
Bel obstacle que l'ignorance, lorsqu'un sang généreux, à chaque battement du cœur, inspire de tout sacrifier à ce qu'on ne connaît pas! (Bernanos.)
Aucun des onze ouvrages consultés, cependant, ne reçoit la construction inspirer quelqu'un à faire quelque chose. Je reformulerais peut-être de cette manière le premier exemple à l'étude :
Mais pour cela, il faut du temps. Du temps aux jeunes femmes pour terminer leurs études. Acquérir des compétences. Et en inciter d'autres à faire comme elles.
En ce qui concerne le second exemple, je proposerais :
... on ne peut pas forcer les gens à se sentir Britanniques - nous devons / il faut les inciter à le devenir.
... on ne peut pas forcer les gens à se sentir Britanniques - nous devons / il faut leur en inspirer le désir.
Il y a d'autres possibilités, bien entendu.
Line Gingras
Québec
« La petite fille qui ne sourit pas » : http://www.cyberpresse.ca/article/20061217/CPOPINIONS/612...
« Accommodement à la britannique » :
http://www.cyberpresse.ca/article/20070128/CPBLOGUES07/70...
02:40 | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, journalisme
24 mars 2007
Influer le cours des choses
« Alors, quand peut-on vivre avec la conscience d'être membre du corps social et avoir le sentiment aigu d'influer le cours des choses sinon dans ce geste unique de voter... » (Denise Bombardier.)
D'après ce que j'ai vu dans les douze ouvrages consultés, le verbe influer ne s'utilise jamais avec un complément d'objet direct; il est plutôt suivi de la préposition sur :
Le contexte économique influe sur la performance de l'entreprise. (Multidictionnaire.)
La maladie a influé sur son caractère. (Lexis.)
Une telle intervention peut influer sur le verdict. (Girodet.)
Tes pensées d'avant le sommeil influent sur tes rêves. (Romains, dans le Petit Robert.)
Les réflexions venimeuses qu'ils échangeaient allaient influer sur le cours de leurs vies respectives. (Aymé, dans le Lexis.)
L'hormone de la glande surrénale (adrénaline) influe sur la pression artérielle... (J. Rostand, dans le Trésor de la langue française informatisé.)
Plus tard, Duroc eût encore influé sur d'autres grands événements... (Las Cases, dans le Trésor.)
Je vois dans quel sens très heureux Verhaeren a influé sur toi. (Rivière, dans le Trésor.)
Le Trésor signale d'autres constructions possibles, mais peu courantes.
Line Gingras
Québec
« Un geste lourd de sens » : http://www.ledevoir.com/2007/03/24/136503.html
06:30 | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, journalisme
23 mars 2007
Après l'Arménie, la Russie?
« C'est devenu une détestable habitude. Après l'Arménie, la Géorgie, la Lituanie, la Moldavie et l'Ukraine, sans oublier le géant anglo-néerlandais Shell, la Russie use de nouveau de ses ressources naturelles comme de forceps. Sa dernière cible? La Biélorussie. Le but? Retrouver la grandeur d'antan. » (Serge Truffaut.)
L'énumération introduite par après semble jouer le rôle de complément circonstanciel de temps du verbe user, mais ce n'est pas le cas : l'Arménie, la Géorgie, etc. n'ont pas fait ce qu'on paraît leur reprocher, soit user de leurs ressources naturelles comme de forceps - avant que la Russie ne le fasse à nouveau. D'après le contexte, on a voulu dire plutôt, à mon avis :
Après l'avoir fait à l'endroit de l'Arménie, de la Géorgie, de la Lituanie, de la Moldavie et de l'Ukraine, sans oublier le géant anglo-néerlandais Shell, la Russie use à nouveau de ses ressources naturelles comme de forceps.
* * * * *
« ... le groupe anglo-néerlandais a opté pour la deuxième option. »
... le groupe anglo-néerlandais a opté pour la deuxième possibilité.
Line Gingras
Québec
« Les forceps russes » : http://www.ledevoir.com/2006/12/30/126138.html
05:30 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : langue française, syntaxe, journalisme, presse
22 mars 2007
Motion de non-confiance
« Il a déjà annoncé qu'il n'était pas prêt à se joindre au Bloc québécois dans l'aventure consistant à présenter une motion de non-confiance dès le retour de la Chambre des communes, fin janvier, sur la mission en Afghanistan. » (Hélène Buzzetti.)
D'après ce que je vois dans le Multidictionnaire, le Colpron, TERMIUM et le Grand dictionnaire terminologique, l'expression motion de non-confiance est le calque de motion of non-confidence. TERMIUM et le GDT recommandent d'employer plutôt motion de censure pour désigner une « proposition mettant en cause la responsabilité du gouvernement et la confiance que les députés lui accordent » (GDT; on propose aussi motion de défiance).
Je vous renvoie à l'article du GDT pour des précisions utiles - notamment sur motion de blâme, qui correspond à une réalité différente.
Line Gingras
Québec
« Horoscope politique - Que réserve l'année 2007 à nos politiciens fédéraux? » : http://www.ledevoir.com/2006/12/30/126127.html
06:55 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, anglicisme, journalisme, presse
21 mars 2007
De d'autres
« Ce n'est pas l'avis de d'autres témoins... » (Antoine Robitaille.)
On s'abstient d'employer devant d'autres la préposition de :
La présence d'autres (et non *de d'autres) personnes. (Multidictionnaire.)
Je ne pense pas à eux, mais à d'autres. / Je ne parle pas d'eux, mais d'autres. (Hanse-Blampain.)
Selon Marie-Éva de Villers, c'est une question d'euphonie.
Line Gingras
Québec
« Robert Dutrisac, un héros » : http://www.ledevoir.com/politique/blogues/elections2007/2...
02:25 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : langue française, grammaire, journalisme, médias
20 mars 2007
Nombre décimal inférieur à deux
« ... devant un auditoire de 1,85 millions de personnes. » (Fabien Deglise.)
En français, le substantif déterminé par un nombre décimal inférieur à deux reste au singulier :
La somme s'élève à 1,5 million de dollars, à 1,5 milliard de dollars. (Multidictionnaire, quatrième édition, page 936.)
1,9 habitant au kilomètre carré. (D'après le Hanse-Blampain, quatrième édition, page 597.)
Line Gingras
Québec
« Tout le monde parle des verts » : http://www.ledevoir.com/politique/blogues/elections2007/2...
01:25 | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : langue française, grammaire, orthographe, journalisme
19 mars 2007
À grands renforts de
« Débat de mots sinon d’idées, à grands renforts de répétitions. » (Hélène Matteau.)
Doit-on écrire à grands renforts de ou à grand renfort de?
Le Petit Robert, le Multidictionnaire et le Lexis, à l'article « renfort », reçoivent uniquement la graphie à grand renfort de :
S'exprimer à grand renfort de gestes. (Petit Robert.)
À grand renfort de paroles. (Multidictionnaire.)
Obtenir une place à grand renfort de protections. (Lexis.)
Je me rhabillais de mon mieux, à grand renfort d'épingles. (Beaumarchais, dans le Petit Robert.)
Le Trésor de la langue française informatisé, toutefois, admet clairement le pluriel comme le singulier :
Mener campagne à grand renfort d'affiches.
Organiser quelque chose à grand(s) renfort(s) de publicité.
C'est précisément ce que j'ai dit dans ma dissertation de ce matin, et fait valoir à grand renfort de citations... (Gide.)
Si j'avais le pouvoir absolu, à coup sûr j'enverrais M. Oudot et compagnie travailler aux fortifications, à grands renforts de coups de pied. (Flaubert.)
Line Gingras
Québec
« Zérostars » : http://forums.chatelaine.qc.ca/advansis/?mod=for&act=...
06:30 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, orthographe, journalisme, médias
18 mars 2007
Supputer sur les chances
« On supputait sur les chances des uns et des autres d’accéder au conseil des ministres. » (Pierre Cayouette.)
D'après le Petit Robert, le Multidictionnaire, le Lexis, le Girodet et le Trésor de la langue française informatisé, supputer est un verbe transitif :
Supputer ses chances. (Petit Robert.)
Ils supputent leurs chances de succès. (Multidictionnaire.)
Supputer l'effort à fournir, ses chances; supputer les conséquences, les risques de quelque chose. (Trésor.)
Ils étaient, les uns comme les autres, à supputer les chances de la royauté. (Aragon, dans le Lexis.)
Un tailleur, en vous voyant, suppute instinctivement l'étoffe de votre habit. (Proust, dans le Petit Robert.)
Je suis en train de supputer mes profits et pertes de cette semaine... (Dumas père, dans le Trésor.)
Nous supputions à présent le temps nécessaire à l'aller et au retour... (Pesquidoux, dans le Trésor.)
Un astronome qui suppute l'existence d'un astre dont il ne perçoit pas encore directement les rayons. (Gide, dans le Trésor.)
Le Trésor relève un exemple où l'objet de l'évaluation marquée par le verbe supputer est introduit au moyen de la préposition sur :
D'aucuns se lèvent la nuit pour mesurer la force du vent au rayonnement des étoiles, pour relever leur direction ou supputer sur leur hauteur. (Pesquidoux.)
Je crois néanmoins, comme les autres ouvrages consultés ne reçoivent pas cet emploi et comme le Trésor donne le verbe supputer uniquement pour transitif, qu'il vaut mieux construire le complément de façon directe :
On supputait les chances des uns et des autres d’accéder au conseil des ministres.
* * * * *
« Pour en finir une fois pour toute_ avec cette comparaison idiote... »
Vérification faite dans le Petit Robert, le Multidictionnaire, le Hanse-Blampain, le Lexis et le Trésor, la locution adverbiale une fois pour toutes s'écrit avec un s à toutes :
Je vous le dis une fois pour toutes, ne venez plus me déranger. (Lexis.)
On se met à rêver tout éveillé qu'on est couché une fois pour toutes dans sa fosse... (Mille, dans le Trésor.)
Line Gingras
Québec
« PQ 1976 - ADQ 2007 : la comparaison qui tue... » : http://forums.lactualite.com/advansis/?mod=for&act=di...
04:15 | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, orthographe, journalisme
17 mars 2007
Les deux-tiers
« ... le nouveau Boisclair, celui qui parle comme tout le monde, doit parler d’un sujet dont les deux-tiers du monde ne veulent pas entendre parler. » (Michel C. Auger, dans Le Soleil.)
Marie-Éva de Villers signale que l'expression deux tiers s'écrit sans trait d'union; c'est effectivement cette graphie que je trouve dans le Petit Robert, le Lexis et le Trésor de la langue française informatisé :
Les deux tiers. (Petit Robert.)
Majorité des deux tiers. (Trésor.)
Il a fait les deux tiers du travail. (Lexis.)
Il y a sur le globe deux tiers de mers, un tiers de terres. (Abellio, dans le Trésor.)
Les deux tiers des participantes sont persuadées ou persuadés du bien-fondé de la proposition. (Multidictionnaire.)
Line Gingras
Québec
« Nouveau Boisclair, vieux problème » : http://blogues.cyberpresse.ca/mcauger/?p=606140839#more-6...
06:25 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, orthographe, journalisme, presse
16 mars 2007
Prendre pour acquis
« Les Canadiens ne doivent pas prendre leurs libertés civiles pour acquis__, prévient Maher Arar. » (PC.)
Le Multidictionnaire, le Chouinard, le Colpron et le Dagenais condamnent prendre pour acquis, calque de l'anglais to take for granted. On trouve dans le Colpron, et surtout dans le Meertens, de nombreuses façons de rendre cette idée, selon le contexte. Au nombre des équivalents figurent tenir pour acquis, considérer comme acquis :
Je tenais pour acquis que vous étiez au courant. (Chouinard.)
Tenir un point pour acquis. (Lexis.)
Nous pouvons considérer comme acquis ce premier point. (Petit Robert.)
Nous tenons pour acquise son adhésion au programme. (Multidictionnaire.)
Comme l'indique le dernier exemple, l'adjectif acquis n'est pas invariable :
Les Canadiens ne doivent pas tenir leurs libertés civiles pour acquises...
Line Gingras
Québec
« Ne prenez pas les libertés civiles pour acquis [sic], prévient Maher Arar » : http://www.ledevoir.com/nouvelles-en-continu.html#ID:2811...
05:00 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, anglicisme, grammaire, orthographe, journalisme
14 mars 2007
Se douter - accord du participe passé
« ... Julie Cossette ne se serait jamais douté_, en septembre dernier, qu'elle se ferait subtiliser tout le contenu de son compte bancaire. » (Paule Vermot-Desroches.)
Se douter est un pronominal subjectif : verbe accidentellement pronominal (c'est-à-dire ne s'utilisant pas toujours à la forme pronominale), douter fait corps avec le pronom réfléchi, qui ne peut s'analyser séparément.
Comme le signale Marie-Éva de Villers, le participe passé s'accorde en genre et en nombre avec le sujet :
... Julie Cossette ne se serait jamais doutée...
Line Gingras
Québec
« Elle répond à un courriel et 3000 $ s'envolent » : http://technaute.lapresseaffaires.com/nouvelles/texte_com...
04:25 | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : langue française, grammaire, orthographe, journalisme
13 mars 2007
Débuter avec
« L'attaque canadienne avait débuté avec un assaut lancé par des blindés dans ce qui est considéré comme un bastion de la rébellion talibane. » (PC.)
J'ai consulté treize ouvrages à l'article « débuter »; d'après les résultats de mes recherches, le verbe s'emploie avec la préposition par afin d'introduire le premier élément, la première partie de quelque chose :
Le film débute par une scène très amusante. (Multidictionnaire.)
Cet écrivain débute par un excellent roman. (Dagenais.)
Le rapport du président débutait par un éloge du secrétaire général. (Berthier et Colignon.)
Le motif en notes détachées, par lequel débute l'allégro. (Berlioz, dans le Petit Robert.)
L'échec provisoire par lequel toutes les hautes entreprises débutent. (Cocteau, dans le Trésor de la langue française informatisé.)
J'ai relevé un exemple où le verbe est suivi de la préposition avec - devant un complément qui renseigne sur la forme plutôt que sur le contenu :
Il débute avec un accent bas et tendre : - Mes biens [sic] chers amis, enfin, nous nous retrouvons! (Barrès, dans le Trésor.)
La construction débuter avec, dans la phrase à l'étude, me paraît le calque de to begin with.
Line Gingras
Québec
« Désertion? » : http://www.ledevoir.com/2006/12/30/126185.html
07:20 | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, anglicisme