07 août 2007
Négligence excusable?
« Les machines, qui ne sont pas tout à fait des guichets bancaires puisqu’ils ne permettent pas___ retirer de billets... » (Tristan Péloquin.)
Le pronom ils ne remplace pas guichets bancaires, puisque ces guichets, justement, permettent de retirer des billets; il renvoie plutôt à machines, féminin pluriel.
Et le verbe permettre, suivi d'un infinitif complément, s'emploie avec la préposition de.
Tout le monde le sait? Oui, tout le monde le sait - enfin, je le suppose. Mais cela ne dispense personne de se relire; et les professionnels de l'écriture, à cet égard, doivent donner l'exemple. Dans le cas présent, la négligence ne peut s'excuser ni par l'urgence de la nouvelle, ni par la situation périlleuse où se trouverait le journaliste.
La forme du message doit correspondre au contenu.
J'apprécie le naturel, et plus qu'un soupçon de désinvolture à l'occasion; l'erreur est humaine, je ne le sais que trop; mais j'ai horreur du laisser-aller.
* * * * *
Note du 8 août 2007, à 2 h 40 : Monsieur Péloquin a remplacé le pronom ils par elles; apparemment il n'a pas cru bon d'introduire l'infinitif complément du verbe permettre au moyen de la préposition de, toutefois. Celle-ci est pourtant toujours utilisée en français correct, comme on s'en rendra compte en consultant, à l'article « permettre », le Petit Robert, le Multidictionnaire, le Hanse-Blampain, le Lexis, le Trésor de la langue française informatisé, le Colin, le Girodet ou le Thomas.
Line Gingras
Québec
« Des guichets automatiques dans les églises. Alléluia! » : http://blogues.cyberpresse.ca/peloquin/?p=247
16:05 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : langue française, grammaire, journalisme, médias
05 août 2007
Elle s'est laissée tenter
« Annie, mon invitée, s'est laissée tenter par la superbe salade de roquette... » (Philippe Mollé.)
On respecte habituellement la règle suivante : « Le participe passé de la forme pronominale suivi d'un infinitif s'accorde avec le complément direct lorsque celui-ci fait l'action exprimée par l'infinitif. » (Multidictionnaire.)
Dans la phrase à l'étude, le participe passé a pour complément direct le pronom réfléchi s', qui représente Annie; comme celle-ci ne fait pas l'action exprimée par l'infinitif, le participe reste invariable :
Annie, mon invitée, s'est laissé tenter par la superbe salade de roquette...
Line Gingras
Québec
« Méchant Bœuf, méchant resto » : http://www.ledevoir.com/2007/08/03/152233.html
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31 juillet 2007
Entre tirets
« Une décision de la Cour suprême - l’arrêt Hamilton, qui traitait d’un site sur lequel un homme incitait les internautes à faire des fraudes par carte de crédit - pourrait toutefois être invoqué ici. » (Tristan Péloquin.)
Le passage entre tirets apporte une précision utile, c'est certain; mais on peut le supprimer sans modifier le message central de la phrase :
Une décision de la Cour suprême pourrait toutefois être invoquée ici.Line Gingras
Québec
« Quand un pédophile devient blogueur » : http://blogues.cyberpresse.ca/peloquin/
23:55 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : langue française, orthographe, grammaire, journalisme
28 juillet 2007
Personne, c'est une femme?
« Mais qui aurait osé reprocher à Madame de la voir se livrer à de telles activités? Personne bien entendue. » (Michel Vastel, dans Le Journal de Québec.)
Personne, employé comme nom, est toujours féminin, même s'il désigne un homme :
Cette personne sera entendue par le comité demain après-midi.
Utilisé comme pronom indéfini, il est toujours masculin (et singulier, cela va de soi) :
Personne n'est contraint de l'imiter.
Personne ne me dira ce que je dois faire.
Dans un autre ordre d'idées, bien entendu, employé au sens de « évidemment », est une locution adverbiale et reste donc invariable :
Mais qui aurait osé reprocher à Madame de la voir se livrer à de telles activités? Personne, bien entendu.
Line Gingras
Québec
« La culture du "tout m'est dû" » : http://www.canoe.com/infos/chroniques/michelvastel/archiv...
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25 juillet 2007
Joujous
« Ne remplissez jamais les formulaires d’enregistrement qui vous sont fournis avec vos joujous électroniques. » (Tristan Péloquin.)
Bijoux, cailloux, choux, genoux, hiboux, joujoux, poux.
C'est comme monter à bicyclette, non?
Line Gingras
Québec
« Harry Potter piraté : l'art de se mettre dans la m... » : http://blogues.cyberpresse.ca/peloquin/?p=239
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22 juillet 2007
Quoi que + indicatif
« Quoi qu'en pensait cet apparatchik libéral, M. Charest n'a eu aucune difficulté à trouver neuf ministrables parmi les élues du 26 mars. » (Michel David.)
Après quoi que, il faut employer le subjonctif :
Quoi qu'il dise, quoi qu'il fasse, restez bien tranquilles.
Je ne parvins plus à faire quoi que ce fût de mon programme. (Duhamel, dans le Petit Robert.)
On aurait pu écrire :
Quoi qu'en pensât cet apparatchik libéral...
Malgré ce qu'en pensait / En dépit de ce qu'en pensait / Peu importe ce qu'en pensait cet apparatchik libéral...
N'en déplaise à cet apparatchik libéral...
Line Gingras
Québec
« Les trois étoiles » : http://www.ledevoir.com/2007/06/09/146791.html
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21 juillet 2007
Fi donc
« D'ailleurs, son portrait d'homme blessé (dans son orgueil) est d'une si grande violence, frôlant même la stupidité - dans une scène plutôt absurde, cet opérateur de steadicam veut imposer ses idées visuelles au réalisateur d'une pub de voiture, faisant fi de la hiérarchie du cinéma et les lois implacables du marketing télévisé... -, ce qui freine nos élans de sympathie devant ses déboires financiers et ses troubles émotionnels. » (André Lavoie.)
On a le choix entre deux constructions :
D'ailleurs, son portrait d'homme blessé (dans son orgueil) est d'une si grande violence [...] qu'il freine nos élans de sympathie...
D'ailleurs, son portrait d'homme blessé (dans son orgueil) est d'une grande violence [...], ce qui freine nos élans de sympathie...
* * * * *
... faisant fi de la hiérarchie du cinéma et des lois implacables du marketing télévisé...
Line Gingras
Québec
« La vie de famille dans la Ville éternelle » : http://www.ledevoir.com/2007/07/20/150863.html
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18 juillet 2007
Appeler quelqu'un de + infinitif
« Le Conseil de l'Europe a appelé les États-Unis de ne pas exécuter Troy Davis... » (Fanny Carrier, AFP.)
Les dictionnaires généraux ne reçoivent que la construction appeler quelqu'un (ou être appelé) à faire quelque chose :
Appeler quelqu'un en justice; l'appeler à comparaître devant le juge. (Petit Robert.)
Vous, du moins, êtes appelée à remplir les devoirs du mariage et de la maternité. (Mauriac, dans le Lexis.)
Étant appelé à témoigner, à l'occasion d'une sorte de crime, il a gardé une certaine réserve, comme il convient à un témoin de bonne volonté. (Camus, dans le Trésor de la langue française informatisé.)Appeler quelqu'un à assumer une charge, à jouer un rôle. (Trésor.)
Cette vie nous plaisait et endormait en nous ces mouvements fiévreux de l'âme, qui usent inutilement l'imagination des jeunes hommes avant l'heure où leur destinée les appelle à agir ou à penser. (Lamartine, dans le Trésor.)On aurait pu écrire :
Le Conseil de l'Europe a appelé [engagé, exhorté] les États-Unis à ne pas exécuter Troy Davis...
Line Gingras
Québec
« Les témoins avouent avoir menti, il sera tout de même exécuté » : http://www.cyberpresse.ca/article/20070716/CPMONDE/707161...
05:58 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, journalisme
16 juillet 2007
Allons!
« ... les promeneurs de pistes cyclabes... » (Pierre Foglia.)
Cyclables.
« ... dans les circonstance particulières... »
« ... dans l'étape de jeudi, les deux grands favoris, Andreas Klöden et Alexandre Vinokourov_ ont lourdement chuté. »
Il faut deux virgules pour encadrer les noms des cyclistes, qui constituent une apposition détachée - une sorte de parenthèse précisant quels sont les grands favoris.
« ... cela veux dire que son équipe... »
Veut.
« Au fait, Vallet vous a-t-il dit qu'il avait déjà porté le maillot à pois du meileur grimpeur? »
« ... permettre au Kazakh Alexandre Vinolourov de gagner le Tour de France. »
Le nom est orthographié six fois Vinokourov.
« En fait Klöden pourrait gagner ce Tour un doigt dans le nez et l'autre dans le cul, mais il ne __ fera pas tant que... »
Il ne le fera pas.
Tant pis, je vais me répéter : une bonne relecture n'aurait pas été superflue.
Line Gingras
Québec
« Le Tour n'est pas commencé » : http://www.cyberpresse.ca/article/20070715/CPSPORTS09/707...
00:25 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, grammaire, orthographe, journalisme
14 juillet 2007
Peut faire mieux
« L'aide offerte par le FMI s'avère aussi lente que totalement inadaptée. Prisonnière de son dogmatisme économique, il s'entête à réclamer... » (Éric Desrosiers.)
L'aide n'est pas prisonnière de son dogmatisme économique; c'est le FMI [Fonds monétaire international], représenté par le pronom il, qui en est prisonnier.
« Ces derniers retrouveront quand même assez rapidement le chemin de la croissance, mais avec moins vigueur qu'auparavant. »« ... l'on ne veut plus jamais être aussi vulnérable aux magouilles des spéculateurs et aux humeurs des marchés financiers, ni d'avoir à s'abaisser à quémander l'aide du FMI. »
... l'on ne veut plus jamais être [...] ni avoir...
« Dans le sud et l'est de l'Asie, on a aussi décidé aussi de se constituer des réserves... »
« Ces réserves atteignent aujourd'hui un niveau astronomique qui dépasse de beaucoup les besoins de créances aussi bien publiques et que privées. »
« Les réserves de devises étrangères de l'ensemble des pays en voie de développement de la région sont en effet passé 250 milliards, en 1997, 2500 milliards aujourd'hui. »
... sont en effet passées de 250 milliards, en 1997, à 2500 milliards aujourd'hui.
Ai-je besoin de le dire? Une bonne relecture n'aurait pas été superflue.
Line Gingras
Québec
« Perspectives - Petits pépins » : http://www.ledevoir.com/2007/07/09/149822.html
03:33 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, orthographe, grammaire, journalisme
13 juillet 2007
Tout désignée
« ... cette ville est tout désignée pour Yohan... » (Isabelle Légaré, dans Le Nouvelliste.)
Tout, adverbe employé au sens de « tout à fait », « entièrement », est d'ordinaire invariable (voir mon billet du 8 juillet); cependant, il varie « devant un mot féminin commençant par une consonne » (Le bon usage, douzième édition, paragraphe 955), à l'exception du h muet :
Je l'ai trouvée tout habillée. (Duras.)
Mais n'te promène donc pas toute nue. (Titre d'un vaudeville de Feydeau.)
... cette intarissable adolescence qui continuait à passer, toute hérissée de drapeaux rouges. (Malraux.)
[Citations tirées du Bon usage.]
Il fallait donc écrire :
... cette ville est toute désignée pour Yohan...
Line Gingras
Québec
« Qui prend emploi prend pays » : http://www.cyberpresse.ca/article/20070712/CPNOUVELLISTE/...
23:55 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, grammaire, orthographe, journalisme
11 juillet 2007
Incomber une responsabilité à quelqu'un
« On peut quand même se demander s'il regrette aujourd'hui de ne pas en avoir incombé la responsabilité aux partis d'opposition, l'an dernier. » (Norman Spector.)
Le verbe incomber n'admet pas de complément d'objet direct; il ne peut pas non plus avoir pour sujet un nom (ni un pronom) désignant une personne. On ne saurait donc incomber une responsabilité à quelqu'un.
Par contre, on peut très bien dire qu'une responsabilité - ou une charge, une obligation - incombe à quelqu'un ou à une collectivité (lui revient, lui appartient, lui est imposée) :
Les devoirs et les responsabilités qui lui incombent. (Petit Robert.)
Ces réparations incombent au propriétaire de la maison. (Lexis.)
Mme Tassy connaît l'obligation qui incombe aux maisons des morts d'avoir à tenir table ouverte. (Hébert, dans le Lexis.)
En fait, c'est aux États-Unis qu'appartenait la décision, puisque l'effort principal leur incombait dorénavant. (De Gaulle, dans le Trésor de la langue française informatisé.)
Le Petit Robert et le Trésor reçoivent également le tour impersonnel il incombe à quelqu'un de + infinitif :
En sa qualité de père et d'éducateur, il lui incombait de dénoncer la flatterie en général comme une pratique des plus détestables. (Aymé, dans le Trésor.)
Dans la phrase à l'étude, monsieur Spector a peut-être voulu dire :
... de ne pas en avoir fait retomber la responsabilité sur les partis d'opposition...
... de ne pas en avoir rejeté la responsabilité sur les partis d'opposition...
Line Gingras
Québec
« Rester en Afghanistan » : http://www.ledevoir.com/2007/07/12/150136.html?fe=1480&am...
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09 juillet 2007
Faire de même
« Les 31 écoles alternatives du Québec sont en campagne ces jours-ci pour convaincre la ministre de leur permettre de conserver leurs bulletins. Une lettre a été envoyée en ce sens la semaine dernière à la ministre de l'Éducation, et les parents de chacune des écoles sont invités à faire de même. » (Clairandrée Cauchy.)
Le verbe faire peut très bien se substituer à un autre verbe, mais les deux doivent être employés à la même forme : faire, verbe actif, ne saurait remplacer le passif a été envoyée. Je proposerais :
... Elles ont envoyé une lettre en ce sens [...] et les parents de chacune des écoles sont invités à faire de même.
Line Gingras
Québec
« Le bulletin uniforme est contesté » : http://www.ledevoir.com/2007/06/20/147949.html
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08 juillet 2007
Toute aussi déçue
« La procureure de la Couronne, Me Sarah-Julie Chicoine, a affirmé [...] être toute aussi déçue que son collègue. » (Le Journal de Québec.)
Tout est adverbe dans la phrase à l'étude; employé au sens de « tout à fait », « entièrement », il renforce un autre adverbe, aussi, et doit donc rester invariable : la procureure était tout aussi déçue que son collègue.
Il pourrait arriver, cependant, que tout soit variable, même placé devant aussi :
Elles étaient toutes aussi déçues que moi.
Dans ce dernier exemple, toutes est pronom indéfini : Toutes, sans exception, étaient aussi déçues que moi.
Line Gingras
Québec
« 15 mois dans la collectivité au lieu de l'Afghanistan » : http://www.canoe.com/infos/societe/archives/2007/07/20070...
23:55 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, grammaire, orthographe, journalisme
06 juillet 2007
Nous même
« La prochaine fois, on reste chez nous et on fait la vaisselle nous même. » (Renée Laurin.)
L'adjectif indéfini même se joint au pronom personnel par un trait d'union, et prend la marque du pluriel si le pronom désigne plusieurs personnes : nous-mêmes.
Line Gingras
Québec
« Enfants interdits sur les terrasses » : http://www.blogue.canoe.com/2007/07/04/enfants_interdits_sur_les_terrasses
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02 juillet 2007
Quand et quant
« Devant une telle ambiguïté, le primat s'est lui-même montré perplexe quand à la direction qu'il donnera à l'Église du Canada. » (Jean-Claude Leclerc.)
On n'écrit pas de la même façon la conjonction voisine de lorsque - quand - et le premier élément de la locution prépositive synonyme de pour ce qui est de, relativement à - quant (à) :
... le primat s'est lui-même montré perplexe quant à la direction qu'il donnera à l'Église du Canada.
Notez bien, toutefois, que l'on peut trouver quand suivi de la préposition à :
J'aimerais bien la voir quand à son réveil elle est encore un peu perdue.
Comment veux-tu que je te laisse rentrer avec ce danger public, quand au surplus il vient de boire six bières d'affilée?
Line Gingras
Québec
« Crise chez les anglicans - La dispute sur l'homosexualité divise l'Église » : http://www.ledevoir.com/2007/06/26/148511.html
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30 juin 2007
C'est moi qui
« Ce n’est pas moi qui l’écrit... » (Richard Hétu.)
Ce n'est pas moi non plus.
Le verbe ayant pour sujet le pronom relatif qui s'accorde avec l'antécédent du relatif, c'est-à-dire avec le nom ou le pronom que le relatif représente - dans le cas qui nous occupe, le pronom moi, première personne du singulier :
Ce n'est pas moi qui l'écris.
* * * * *
Note du 1er juillet : Je viens de me rendre compte que monsieur Hétu s'est corrigé; c'est tout à son honneur.
Line GingrasQuébec
« J'aime Paris » : http://blogues.cyberpresse.ca/hetu/?p=70411626
05:10 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, grammaire, orthographe, journalisme
27 juin 2007
Son devoir de harcèlement
« Son club lui reprochait d'avoir manqué à son devoir de loyauté, de harcèlement moral sur un joueur et d'indiscrétions auprès de clubs adverses. » (L'Équipe, avec AFP.)
On lui reprochait [à Jacky Bonnevay] d'avoir manqué... à son devoir de harcèlement? Bien entendu, ce n'est pas ce que les journalistes ont voulu dire; c'est pourtant ce qu'ils ont écrit.
Les compléments de harcèlement et d'indiscrétions ont tout l'air de se rapporter au nom devoir, déjà doté du complément de loyauté, dont la forme est semblable; en fait, ils se rattachent selon la logique au verbe reprochait, auquel ils ne peuvent pas, toutefois, se raccorder grammaticalement.
Chacun sait qu'on ne reproche pas de harcèlement ni d'indiscrétions : reprocher appelle un complément d'objet direct - on reproche quelque chose à quelqu'un. La préposition de qui précède le premier complément, le verbe avoir manqué, n'a d'autre rôle que d'introduire l'infinitif; elle disparaîtrait devant un nom : Son club lui reprochait son manque de loyauté.
Comment restructurer la phrase? Je proposerais :
Son club lui reprochait d'avoir manqué à son devoir de loyauté, (d'avoir) exercé du harcèlement moral sur un joueur et (d'avoir) commis des indiscrétions auprès de clubs adverses.
Line Gingras
Québec
« Foot - L2 - Angers doit dédommager Bonnevay » : http://www.lequipe.fr/Football/breves2007/20070626_233948Dev.html
07:00 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, journalisme
25 juin 2007
Elle s'est demandée
« ... la ministre des Finances [...] s'est demandée si les partis d'opposition avaient "un sens des responsabilités", compte tenu du coût d'une élection. » (Antoine Robitaille et Robert Dutrisac.)
Se demander est un verbe accidentellement pronominal, c'est-à-dire qui ne s'emploie pas toujours à la forme pronominale; et c'est un pronominal réfléchi, du fait que le sujet et le pronom réfléchi désignent la même personne. Avec quoi s'accorde le participe passé, en pareil cas? Pas avec le sujet, mais avec le complément direct, s'il précède le verbe. La ministre a demandé qui ou quoi? Elle a demandé si les partis d'opposition avaient « un sens des responsabilités »... Le complément direct est placé après le verbe (et en outre c'est une proposition) : le participe passé doit rester invariable.
Quant au pronom réfléchi, s', il répond à la question à qui? - et ne commande donc pas l'accord.
Line Gingras
Québec
« L'opposition rejette le budget » : http://www.ledevoir.com/2007/05/25/144738.html
06:37 | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : langue française, grammaire, orthographe, journalisme
23 juin 2007
Construction du gérondif
« C'est en reconnaissant l'apport indéniable des aînés qu'ils se sentiront davantage membre à part entière de cette société qu'ils ont façonnée durant tant d'années. » (Marguerite Blais, ministre responsable des Aînés.)
Se sentir étant un verbe attributif (ils se sentiront = ils auront le sentiment d'être), membre doit s'accorder avec le sujet, ils : ... ils se sentiront davantage membres à part entière...
* * * * *
La phrase à l'étude serait mieux structurée si le gérondif, en reconnaissant, avait pour sujet (implicite) celui du verbe dont il est complément circonstanciel. (Voir à ce propos Le bon usage, douzième édition, paragraphe 328.) Comment faire en sorte que les aînés se sentent davantage membres à part entière de la société? En reconnaissant leur apport indéniable, d'après la ministre. Je suggérerais donc :
C'est en reconnaissant l'apport indéniable des aînés qu'on les amènera à se sentir davantage membres à part entière...
C'est en reconnaissant l'apport indéniable des aînés qu'on leur permettra de se sentir davantage membres à part entière...
Line Gingras
Québec
« Les conditions de vie des aînés » : http://www.ledevoir.com/2007/06/22/148144.html?fe=1330&am...
00:00 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, grammaire, syntaxe, orthographe
22 juin 2007
Trop vieilles, les personnes âgées?
« Mon mandat est de créer les conditions favorisant l'engagement et la valorisation des personnes aînées et de protéger celles qui sont en perte d'autonomie. » (Marguerite Blais, ministre responsable des Aînés.)« Les conditions de vie des personnes aînées constituent à la fois un enjeu de société et une responsabilité qui nous interpelle tous. »
Madame Blais utilise huit fois, dans son texte, le nom aînés - ce qui ne l'empêche pas d'employer le terme personnes aînées dans les deux phrases ci-dessus. Sans doute faut-il la féliciter pour ce louable souci de varier le vocabulaire, mais pourquoi se prive-t-elle de l'expression personnes âgées? Serait-ce une maladie honteuse d'avancer en âge?
Je m'étonne, devant cette manifestation de pudeur extrême, que la ministre ose évoquer une réalité aussi pénible que la perte d'autonomie.
Line Gingras
Québec
« Les conditions de vie des aînés » : http://www.ledevoir.com/2007/06/22/148144.html?fe=1330&am...
07:50 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : langue française, grammaire, orthographe, politique