24 janvier 2008
Dommage que...
« Dommage qu'il eut fallu les médias pour rappeler aux premiers gardiens de cette langue leurs devoirs fondamentaux. » (Marie-Andrée Chouinard.)
D'après les résultats de mes recherches, les locutions dommage que et il est dommage que sont suivies du subjonctif; l'emploi de l'indicatif « pour marquer la réalité du fait », précisent Hanse et Blampain, « est très rare aujourd'hui » :
Dommage que vous ne puissiez pas l'attendre. (Petit Robert.)
Il est dommage que vous n'ayez pas pu venir. (Multidictionnaire.)
Dommage qu'il soit arrivé en retard. (Thomas.)
Dommage qu'il pleuve, nous aurions pu faire une promenade. (Girodet.)
Dommage qu'il ait manqué son train! (Colin.)
Dans le cas qui nous occupe, il y aurait lieu de remplacer le passé antérieur de l'indicatif (eut fallu) par un subjonctif passé, et non par un plus-que-parfait du subjonctif (eût fallu), étant donné que les faits évoqués viennent de se produire :
Dommage qu'il ait fallu les médias pour rappeler aux premiers gardiens de cette langue leurs devoirs fondamentaux.
Line Gingras
Québec
« Le français à l'étude » : http://www.ledevoir.com/2008/01/25/173205.html
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22 janvier 2008
Des contraintes à respecter la loi
« Les petits commerçants qui ne respectent pas la loi sentent d'autant moins de contraintes à la respecter que les clients protestataires se font plus rares. Il existe au Québec, qu'on le nie ou non, une lassitude de la quotidienneté du combat pour faire respecter l'usage du français. » (Denise Bombardier.)
Le verbe contraindre peut avoir pour complément un infinitif; celui-ci est précédé de la préposition à ou de, quoiqu'il y ait « une nette tendance à employer à après les formes actives et quand être contraint apparaît vraiment comme une forme verbale, et de dans les autres cas, où contraint est adjectif » (Hanse et Blampain) :
Les circonstances le contraignirent à travailler très jeune. (Petit Robert.)
Il se contraint à se lever très tôt tous les matins. (Lexis.)
Elle [ma mère] me contraignait d'écrire au nouvel an. (Gide, dans le Trésor de la langue française informatisé.)
Je suis contraint par les circonstances à refuser cette invitation. (Hanse-Blampain.)
Elle s'est vue contrainte de donner son accord. (Multidictionnaire.)
Aucun des ouvrages consultés ne signale cependant ce type de construction (infinitif complément introduit par à ou de) avec le substantif contrainte*. Dans la phrase à l'étude, on aurait pu écrire à mon avis :
Les petits commerçants qui ne respectent pas la loi se sentent d'autant moins contraints [ou tenus] de s'y conformer que les clients protestataires se font plus rares.
Les petits commerçants qui ne respectent pas la loi sentent d'autant moins l'obligation [ou la nécessité] de s'y conformer que les clients protestataires se font plus rares.
Line Gingras
Québec
* Bien entendu, cette observation ne vise pas une tournure comme il y a des contraintes à respecter, où contraintes est complément d'objet direct du verbe à l'infinitif, au lieu d'avoir l'infinitif pour complément.
« Why not? » : http://www.ledevoir.com/2008/01/19/172405.html
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07 janvier 2008
Utilisé à + infinitif
« La plus grande partie des dons récoltés à Paris sera donc utilisée à boucler les fins de mois... » (Éditorial du Monde.)
D'après les quelques exemples que j'ai trouvés dans les dictionnaires, l'infinitif complément du verbe utiliser est introduit au moyen de la préposition pour :
Utiliser un réchaud électrique pour faire chauffer son petit déjeuner. (Lexis.)
Elle n'utilisait pas suffisamment le lierre pour agrémenter ses vieilles églises et ses manoirs. (Giraudoux, dans le Lexis.)
Un tel réacteur pourrait être utilisé pour fournir les impulsions nécessaires... (Goldschmidt, dans le Trésor de la langue française informatisé.)
On aurait pu écrire :
... sera donc utilisée pour boucler les fins de mois...
... servira donc à boucler les fins de mois...
Line Gingras
Québec
« Aider les Palestiniens » : http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3232,36-990583,...
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03 janvier 2008
Hugo Boss y voisine Benjo
« Parallèlement, des entrepreneurs locaux redonnent vie à la rue Saint-Joseph, qui vient de perdre sa dernière section de toiture. Aujourd'hui, Hugo Boss y voisine Benjo, un magasin de jouets... » (Carolyne Parent.)
Marie-Éva de Villers signale que voisiner, au sens d'« être à côté de », introduit son complément au moyen de la préposition avec :
Les rosiers voisinent avec les pivoines dans mon jardin.
Cet avis correspond à ce que je trouve dans le Petit Robert :
Je voisinais à table avec quatre agents. (Céline.)
L'onyx et l'améthyste voisinaient avec le saphir et le diamant. (Daniel-Rops.)
Le Trésor de la langue française informatisé reçoit également cet emploi :
Des jeunes gens qui parlaient haut y voisinaient avec des filles, aux lèvres et aux joues peintes, aux voix éraillées... (Bourget.)
Sur la table, des cartes étaient alignées, et voisinaient avec une boîte de marrons glacés. (Arland.)
Il signale en outre la construction avec complément d'objet direct, qu'il donne cependant pour rare :
L'Olympe, grâce à moi, voisinait de nouveau la terre. (Gide.)
Je recommanderais donc d'écrire :
Aujourd'hui, Hugo Boss y voisine avec Benjo...
Line Gingras
Québec
« Québec - Le Saint-Roch Nouvo » : http://www.ledevoir.com/2007/12/29/170223.html
(Note : La partie revitalisée du quartier Saint-Roch a été baptisée « Nouvo Saint-Roch ».)
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01 janvier 2008
Même, adjectif indéfini - Même déboires...
« ... chaque fois qu'elle se réveille : même petite vie, même déboires, même petites défaites, même indignité, même portefeuille quasiment vide, même maudite mauvaise passe. » (Patrick Lagacé, dans La Presse.)
Lorsqu'il est placé devant le nom et qu'il veut dire « semblable » ou « pareil », même est adjectif indéfini et donc variable, qu'il soit précédé ou non d'un déterminant. Les exemples qui suivent sont tirés du Hanse-Blampain :
Les mêmes quartiers avec leurs mêmes rues malpropres.
Mêmes causes et mêmes effets.
Ils avaient même espoir et mêmes illusions.
Il fallait donc écrire :
... mêmes déboires, mêmes petites défaites...
Line Gingras
Québec
« Nicole est collée à la page 59 » : http://www.cyberpresse.ca/article/20071222/CPOPINIONS05/7...
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31 décembre 2007
Dans tous les milieux le lieu
« Je ne sais pas si c'est parce que le Québec a aimé l'exercice de défoulement que leur a proposé la commission Bouchard-Taylor, mais les soupers de famille, depuis le début du temps des Fêtes, sont devenus dans tous les milieux le lieu choisi d'analyses intéressantes de l'état général du Québec. » (Lise Payette.)
Je suggérerais, dans le premier cas :
Je ne sais pas si c'est parce que le Québec a aimé l'exercice de défoulement que lui a proposé...
Je ne sais pas si c'est parce que les Québécois ont aimé l'exercice de défoulement que leur a proposé...
Et dans le second :
... sont devenus dans tous les milieux l'occasion choisie pour se livrer à des analyses intéressantes...
... sont devenus dans tous les milieux le moment choisi pour se livrer à des analyses intéressantes...
Line Gingras
Québec
« Zone de turbulences en vue » : http://www.ledevoir.com/2007/12/28/170120.html
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30 décembre 2007
Soi? Soit
« Et puis, si je me fie à RDI, tout le monde est soi en magasinage [...] ou sur les pentes de ski… » (Patrick Lagacé.)
Tout le monde est soi-même en magasinage? Sans doute, mais le journaliste a plutôt voulu dire « ou bien ». S'il s'était relu attentivement, il aurait écrit :
... tout le monde est soit en magasinage [...] ou sur les pentes de ski...
Line Gingras
Québec
« Quelques miettes de vacances » : http://blogues.cyberpresse.ca/lagace/?p=70720764
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24 décembre 2007
Ils s'en sont chargé
« J'ai souri en imaginant comment elle aurait réagi en entendant des hommes et des femmes parler ouvertement d'un retour en arrière dans le domaine religieux, et je l'ai presque entendu dire : "Tiens, les 'mangeux de balustrades' sont de retour!" Ou encore : "Les grenouilles de bénitier refont surface..." » (Lise Payette.)
Le participe passé du verbe entendre, conjugué avec avoir et suivi d'un infinitif, s'accorde avec le complément d'objet direct, si celui-ci précède le verbe et fait l'action exprimée par l'infinitif. J'ai entendu qui? l', c'est-à-dire elle, qui dirait... :
... et je l'ai presque entendue dire...
* * * * *
« Les hommes s'en sont chargé. »
Les hommes ont chargé qui? eux-mêmes. Le pronom réfléchi (s', mis pour les hommes) est complément d'objet direct du verbe pronominal; il entraîne donc l'accord du participe passé :
Les hommes s'en sont chargés.
Joyeux Noël à tous!
Line Gingras
Québec
« La magie de Noël » : http://www.ledevoir.com/2007/12/21/169421.html
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21 décembre 2007
N'est ou n'ait?
« ... il est pour le moins étonnant que ce contrat n'est donné lieu à aucune facture... » (Patrice Roy.)
Ce contrat n'a donné lieu à aucune facture. Il est pour le moins étonnant qu'il n'ait donné lieu à aucune facture.
Personne n'est à l'abri d'une faute bête comme celle-là. Raison de plus pour se relire.
Line Gingras
Québec
« Brian Mulroney » : http://www1.radio-canada.ca/nouvelles/Carnets/carnet.asp?...
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20 décembre 2007
Un enfant, une enfant
« ... le traitement réservé à sa fille de 5 ans, qui voyageait seule. Selon Steve St-Louis, son enfant a été laissé à elle-même, jeudi, lors d'un vol entre Edmonton et Montréal, même si elle devait être accompagnée par le personnel de bord. » (Radio-Canada.)
Le nom enfant est masculin ou féminin, selon le sexe de la jeune personne :
Elle se souvenait d'avoir été une enfant malheureuse et délaissée. (Sand, dans le Petit Robert.)
... son enfant a été laissée à elle-même...
Line Gingras
Québec
« Un père en colère » : http://www.radio-canada.ca/regions/ottawa/2007/12/14/004-...
16:54 Publié dans Cultiver le doute | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : langue française, grammaire, orthographe, journalisme
19 décembre 2007
Toutes celles et ceux
« Dans les circonstances, je crois qu'il serait opportun, pour toutes celles et ceux des Premières Nations qui ont le sentiment que leur histoire, leurs valeurs profondes et leur nation ont été bafouées, que vous vous excusiez. » (Alexis Wawanoloath, député du Parti québécois dans Abitibi-Est.)
Tous les garçons et les filles de mon âge / Se promènent dans la rue deux par deux... (Françoise Hardy.)
L'adjectif indéfini toutes ne peut se rapporter qu'à des noms ou des pronoms féminins; devant des termes coordonnés incluant un masculin, il faut employer tous, que l'on fait suivre immédiatement d'un masculin :
... pour tous ceux et celles des Premières Nations...
D'autres formulations seraient possibles :
... pour toutes celles et tous ceux des Premières Nations...
... pour tous les membres des Premières Nations...
... pour toutes les personnes des Premières Nations...
Line Gingras
Québec
« Lettre à Mario Dumont, chef de l'opposition officielle - Propos blessants et méconnaissance des cultures autochtones » : http://www.ledevoir.com/2007/12/17/168861.html
06:38 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : langue française, grammaire, presse, médias
18 décembre 2007
Une Wallone, sa Wallonie
« "La Liégeoise, première Wallone à être élue miss Belgique depuis 2003, ne parle en effet pas le néerlandais." » (AFP, citant le quotidien flamand Het Laatste Nieuws.)
On écrit la Wallonie, mais une Wallonne, la culture wallonne.
* * * * *
« La cérémonie se déroulait à Anvers, au cœur de la Flandre, et lorsque Mlle Poulicek a avoué ne pas comprendre une question posée en néerlandais, elle s'est attirée les huées des 4000 spectateurs présents. »
Il arrive que le participe passé du verbe pronominal s'accorde avec le sujet; cet accord est toujours incorrect, cependant, lorsque le verbe a un complément d'objet direct qui n'est pas le pronom réfléchi, comme dans la phrase à l'étude : elle a attiré quoi? les huées. Le complément d'objet direct étant placé après le verbe, le participe passé doit rester invariable. On écrirait toutefois : Les huées qu'elle s'est attirées...
Le pronom réfléchi, s',est complément d'objet indirect : elle a attiré les huées à elle-même.
* * * * *
« Le quotidien constaste que... »
Line Gingras
Québec
« À peine élue, la nouvelle Miss Belgique sème la controverse » : http://www.cyberpresse.ca/article/20071217/CPINSOLITE/712...
03:20 Publié dans Cultiver le doute, On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : langue française, orthographe, grammaire, journalisme
16 décembre 2007
Preuve de distraction
« C’est bien là la preuve d’un état de décomposition qui me rendent moins tristes les prévisions écologistes les plus pessimistes... » (Pierre Foglia, dans La Presse.)
Qu'est-ce qui allège la peine de monsieur Foglia? Pas les prévisions, évidemment, mais l'état de décomposition - ou la preuve de cet état, ce qui revient au même : ... qui me rend...
Line Gingras
Québec
« On s'engueule encore un petit peu? » : http://www.cyberpresse.ca/article/20071211/CPOPINIONS05/7...
02:15 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : langue française, grammaire, orthographe, journalisme
15 décembre 2007
Accord du participe passé du verbe impersonnel
« Elle a plutôt promis "une consultation d'envergure" pour l'automne. Consultation, il n'y a point eue. » (Manon Cornellier.)
D'après le Multidictionnaire et le Hanse-Blampain, le participe passé du verbe impersonnel reste toujours invariable :
Les orages qu'il y a eu. (Hanse-Blampain.)
Les gouttes qu'il a plu ont mouillé la nappe. (Multidictionnaire.)
Line Gingras
Québec
« Un gouvernement en sous-traitance » : http://www.ledevoir.com/2007/12/05/167311.html
02:50 Publié dans Cultiver le doute | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, grammaire, orthographe, journalisme
11 décembre 2007
Ils sont sautés aux conclusions
« Il y en a qui sont un peu vite sautés aux conclusions... » (Michel Vastel.)
Je ne trouve rien sur l'expression sauter aux conclusions dans le Multidictionnaire, dans le Colpron ni dans le Dagenais. D'après Camil Chouinard, elle serait calquée sur l'anglais to jump to conclusions. De fait, bien que d'un emploi très courant au Québec, elle est absente du Petit Robert et du Lexis (consultés aux articles « sauter » et « conclusion »); et une recherche dans l'ensemble du texte du Trésor de la langue française informatisé n'a donné aucun résultat. Le Chouinard, le Meertens et le Robert & Collins Super Senior suggèrent quelques équivalents, dont tirer des conclusions hâtives, aller trop vite en besogne.
Par ailleurs, le Multidictionnaire et le Hanse-Blampain font observer que le verbe sauter se conjugue avec l'auxiliaire avoir; le Petit Robert et le Lexis n'admettent effectivement pas la construction avec l'auxiliaire être.
Line Gingras
Québec
« Stéphane Dion n'est pas fini » : http://blogues.lactualite.com/vastel/?p=77
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10 décembre 2007
Des absences plus longues que prévues
« Les absences de Steve Bégin et Bryan Smolinski seront plus longues que prévues. » (François Gagnon.)
Le journaliste semble dire que l'on avait prévu les absences des deux joueurs. Ce n'est cependant pas le cas : les absences étant consécutives à des blessures, on ne pouvait les prévoir; ce que l'on avait prévu, par contre, à la suite d'un premier examen des blessés, c'est qu'elles dureraient moins longtemps que ce que l'on pense maintenant. Les absences seront de fait plus longues qu'on ne l'avait prévu - ou, dans une langue relâchée, avec ellipse du sujet et de l'auxiliaire avoir, plus longues que prévu.
Le Petit Robert, consulté à l'article « prévu », donne un exemple de cette construction :
Une marée plus forte que prévu. [On avait prévu non pas la marée, qui se produirait de toute façon, mais que la marée serait moins forte.]
Line Gingras
Québec
« Bégin et Smolinski hors combat » : http://blogues.cyberpresse.ca/gagnon/?p=70312759
05:25 | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : langue française, grammaire, orthographe, journalisme
29 novembre 2007
Grammaire et contresens : attention à l'adjectif possessif!
« Des prisonniers talibans remis par l'armée canadienne aux autorités afghanes sont ensuite torturés par ses services secrets.
"Frappés à coups de brique, privés de sommeil, ongles arrachés, chocs électriques", révélait la journaliste Michèle Ouimet dans La Presse le mois dernier, lors de sa quatrième mission en Afghanistan. » (Paul Journet, dans La Presse.)
L'adjectif ou déterminant possessif ses n'indique pas seulement le nombre du substantif auquel il se rapporte (services secrets, au pluriel), mais encore celui du « possesseur » : ses renvoie à un possesseur singulier (exemple : l'armée cherche à motiver ses soldats), tandis que leurs renverrait à un possesseur pluriel ou à plusieurs possesseurs (exemple : les autorités n'ont pas encore fait connaître leurs commentaires). Or, il n'y a qu'un seul singulier dans la phrase : l'armée canadienne. Et comme cette phrase commence l'article, on ne peut pas chercher un autre possesseur dans une phrase précédente. Faudrait-il donc croire que les services secrets de l'armée canadienne torturent les prisonniers talibans? C'est ce que semblerait nous apprendre le journaliste.
Je lui prescris un double expresso, et une bonne relecture.
Line Gingras
Québec
« Les dessous de la guerre aux Francs-tireurs » : http://www.cyberpresse.ca/article/20071128/CPARTS/7112807...
06:40 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, grammaire, journalisme, presse
24 novembre 2007
Un adversaire, une adversaire
« C'est la Maison-Blanche qui, au milieu de la présente année, s'est mis en tête d'associer Moucharraf avec son vieil adversaire politique Benazir Bhutto. » (Serge Truffaut.)
Le nom adversaire s'emploie au féminin comme au masculin. (Voir le Petit Robert, le Multidictionnaire ou Le bon usage, douzième édition, paragraphe 480.) Et Benazir Bhutto est une femme. Il fallait donc écrire avec sa vieille adversaire - ou avec son adversaire, le déterminant possessif sa étant remplacé par son devant une voyelle.
« Depuis quarante-huit heures, le président pakistanais Pervez Moucharraf fait penser au chien qui essaye de se mordre la queue. Il implore les uns et menace les autres. Il libère des avocats mais musellent d'autres médias. »
L'adjectif autres est de trop : comme les avocats ne sont pas des médias, il n'y a pas lieu de les distinguer d'« autres » éléments de cette catégorie.
Ce ne sont pas les avocats qui musellent des médias, mais le président du Pakistan, représenté par le pronom il :
Il libère des avocats mais muselle des médias.
Line Gingras
Québec
« L'ennemi de mon ennemi » : http://www.ledevoir.com/2007/11/21/165194.html
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08 novembre 2007
Jusqu'à alors
« Pour le premier ministre Matti Vanhanen, "la tuerie a profondément entamé le sentiment de sécurité" qui prévalait jusqu'à alors dans la société finlandaise. » (Agence France-Presse.)
D'après la dizaine d'ouvrages que j'ai consultés - aux articles « jusque » et « alors » -, la préposition jusque « s'emploie sans à » (Girodet) devant l'adverbe alors :
Jusqu'alors, on s'était accommodé de la lampe à huile. (Multidictionnaire.)
Jusqu'alors, il n'avait pas dit un mot. (Lexis.)
Il avait bien travaillé jusqu'alors. (Colin.)
Il avait été maltraité jusqu'alors. (Thomas.)
Jusqu'alors, Louis XIII n'avait pas eu la possibilité d'exprimer sa volonté. (Girodet.)
La musique concrète n'est autre chose que la prise de conscience de ce phénomène jusqu'alors implicite. (Schaeffer, dans le Trésor de la langue française informatisé.)
Je n'aimais point le peuple jusqu'alors, mais dès lors j'eus pitié de lui. (Gide, dans le Trésor.)
Line Gingras
Québec
« Finlande : l'auteur avait annoncé le massacre sur YouTube » : http://www.cyberpresse.ca/article/20071107/CPMONDE/711070...
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05 novembre 2007
Co-exister, co-existence
« ... qui donc peut se mettre à halluciner là-dessus, sinon quelqu'un qui refuse tout simplement de co-exister avec des minorités religieuses? » (Lysiane Gagnon, dans La Presse.)
D'après le Petit Robert, le Multidictionnaire, le Lexis et le Trésor de la langue française informatisé, on écrit coexister, coexistence - sans trait d'union.
« ... les hausses de prix dus aux mauvaises récoltes... »
Ce ne sont pas les prix qui sont dus aux mauvaises récoltes, mais les hausses de prix : dues.
Line Gingras
Québec
« Des tollés injustifiés » : http://www.cyberpresse.ca/article/20071101/CPOPINIONS/711...
06:20 Publié dans Cultiver le doute, On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, orthographe, grammaire, journalisme
03 novembre 2007
Combien de sujets?
« Que cela vous plaise ou non, la séparation de l'État et de l'Église, de l'école et de la religion, sont fondatrices de la société qu'une majorité de Québécois souhaitent aujourd'hui. » (Pierre Foglia.)
Il n'y a qu'un seul sujet, singulier, auquel se rattachent les compléments qui suivent :
Que cela vous plaise ou non, la séparation [...] est fondatrice...
Line Gingras
Québec
« L'intégrisme de Son Éminence » : http://www.cyberpresse.ca/article/20071101/CPOPINIONS/711...
05:40 Publié dans On ne se relit jamais trop | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : langue française, grammaire, orthographe, journalisme