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02 mai 2007

Coordination et changement d'auxiliaire

« Devant quelques milliers de supporters qui avaient gardé la forme malgré la déconfiture du Front national au premier tour, Jean-Marie Le Pen s'est livré à une dénonciation en règle des deux candidats à l'élection de dimanche et appelé à n'en choisir aucun. » (Christian Rioux.)

On peut très bien coordonner les verbes se livrer et appeler. Cependant, comme se livrer se conjugue avec être, et appeler avec avoir, l'auxiliaire ne peut pas rester sous-entendu :

... Jean-Marie Le Pen s'est livré à une dénonciation en règle des deux candidats à l'élection de dimanche et a appelé à n'en choisir aucun.

Grevisse écrit à ce propos : « Il n'est pas conforme au bon usage de ne pas exprimer le second auxiliaire quand il est différent du premier. » (Le bon usage, douzième édition, paragraphe 784, a.)

Line Gingras
Québec

« Présidentielle française - Le Pen appelle à l'abstention massive » : http://www.ledevoir.com/2007/05/02/141753.html?fe=916&...

01 mai 2007

Inadéquat, l'association

Juger inadéquat; attribut du complément d'objet direct; grammaire française; syntaxe du français; orthographe d'accord.

« "Nous jugeons inadéquat_, écrit Québec Pluriel, l'association de cannibale à la communauté noire et à Kunta Kinté, qui, pour votre gouverne, est l'ancêtre africain d'Alex Haley [l'auteur du roman Racines]." » (Paul Cauchon.)

Qu'est-ce qui est inadéquat? L'association de cannibale à la communauté noire et à Kunta Kinté. Selon la grammaire traditionnelle, l'adjectif est attribut du complément d'objet direct : nous jugeons l'association inadéquate, nous jugeons que l'association est inadéquate. L'accord se fait en genre et en nombre.

Line Gingras
Québec

« Les Têtes à claques accusées de racisme » : http://www.ledevoir.com/2007/05/01/141586.html

30 avril 2007

Morts ou vifs

Vivant, participe présent ou adjectif verbal; aux dépens de.

« "Pensez-vous que nous ne sommes que des parasites vivants aux dépens du travail honnête et ardu de nos concitoyens?" » (Mario Cloutier, dans La Presse, citant l'écrivain d'expression anglaise Yann Martel.)

Seraient-ils donc, nos écrivains et nos artistes, des parasites morts?

Mais non, les apparences ont le nez qui trompe : ce qu'on a voulu dire, c'est que pour beaucoup de nos élus, il semblerait qu'écrivains et artistes, en qualité de parasites, ne sachent faire qu'une chose : vivre aux dépens de leurs concitoyens (et non pas aux dépens du travail de leurs concitoyens, je le signale en passant). Il fallait employer le verbe, pas l'adjectif : vivant.

Line Gingras
Québec

« Yann Martel "conseille Stephen Harper" » : http://www.cyberpresse.ca/article/20070417/CPARTS02/70417...

27 avril 2007

Familiariser à

Familiariser à, familiariser avec; se familiariser à, se familiariser avec; familiarisé à, familiarisé avec; préposition à ou avec; grammaire française; syntaxe du français.

« "J'ai rencontré ces deux trapézistes pour suivre un atelier de formation et j'ai été frappée. J'ai tout de suite été convaincue qu'il fallait familiariser nos danseurs aux techniques aériennes et les intégrer au programme de danse", a expliqué hier au Devoir Gay Nardone, dont les cours connaissent aujourd'hui une popularité sans précédent. » (Isabelle Paré.) [Madame Nardone enseigne à l'Université du New Hampshire; ses propos ont sans doute été traduits.]

D'après le Multidictionnaire et le Hanse-Blampain, le verbe familiariser se construit avec la préposition avec. J'ai trouvé effectivement de nombreux exemples de cet emploi dans les onze ouvrages consultés :

Familiariser quelqu'un avec quelque chose

Familiariser un soldat avec le maniement des armes. (Petit Robert.)

Cette lecture m'a familiarisé avec le sujet. (Hanse-Blampain.)

Il faut familiariser les dirigeants de la nation comme le grand public avec la révolution nucléaire. (Goldschmidt, dans le Trésor de la langue française informatisé.)

Se familiariser avec quelque chose

Ils se sont familiarisés avec cette nouvelle méthode. (Multidictionnaire.)

Se familiariser avec le bruit de la rue. (Lexis.)

Né provençal, il s'était facilement familiarisé avec tous les patois du midi. (Hugo, dans le Trésor.)

Être familiarisé avec quelque chose

Nous sommes familiarisés avec ces problèmes. (Hanse-Blampain.)

Il est maintenant familiarisé avec son nouveau métier. (Lexis.)

Je ne suis pas encore familiarisé avec cet ordinateur. (Chouinard.)

Le Trésor ajoute une remarque : Littré atteste la construction familiariser à quelque chose, mais la documentation n'en fournit qu'un seul exemple :

Pour peu qu'il [le lecteur] soit familiarisé « à ces vastes contemplations ». (Bachelard.)

Il me semble donc que seule est vraiment admise la préposition avec :

... familiariser nos danseurs avec les techniques aériennes...

Line Gingras
Québec

« L'"effet Cirque du Soleil" fait boule de neige » : http://www.ledevoir.com/2007/04/27/141108.html?fe=875&...

26 avril 2007

Se refuser de + infinitif

Se refuser de suivi d'un infinitif; se refuser de faire quelque chose; se refuser de ou se refuser à; grammaire française; syntaxe du français.

« Cet ancien élu croit que les gens sont "écœurés", et ce, de bien des choses : du système de santé que les politiciens se refusent de réformer en profondeur... » (Hélène Buzzetti.)

D'après les résultats de mes recherches, on devrait employer se refuser à devant un infinitif, au sens de « ne pas consentir à faire quelque chose », « ne pas vouloir faire quelque chose » :

On refuse de faire une chose, on se refuse à la faire. (Berthier-Colignon.)

Il se refusait à envisager cette solution. (Petit Robert.)

Elles se sont refusées à signer. (Multidictionnaire.)

Ils se sont refusés à nous aider. (Hanse-Blampain.)

Elles se sont refusées à parler. (Girodet.)

Une finesse animale qui s'arrêtait aux apparences et se refusait à aller au fond des choses. (Vidalie, dans le Colin.)

Ma plume se refuse à écrire de telles horreurs. (Larousse du XXe siècle, dans le Thomas.)

Le Trésor de la langue française informatisé admet à la fois se refuser à + infinitif et se refuser de + infinitif. Mais les exemples qu'il propose contiennent la première seulement de ces deux constructions :

Du reste, elle se refusait à voyager cette nuit! (G. Leroux.)

Ses pieds enflés se refusaient à marcher. (Maupassant.)

Le Hanse-Blampain signale que certains écrivains utilisent se refuser de faire quelque chose au sens de « s'interdire de »; cet usage peu courant n'est pas recommandé.

Line Gingras
Québec

« PLC : la politique de la peur en sursis » : http://www.ledevoir.com/2007/03/29/137386.html

24 avril 2007

Contribuer

Contribuer quelque chose; contribuer + complément d'objet direct; construction du verbe contribuerto contribute something; grammaire française; syntaxe du français; anglicisme.

« Pris dans le bourbier irakien, les États-Unis ne peuvent contribuer plus que les 15 000 hommes déjà stationnés dans le sud de l'Afghanistan. » (Bernard Descôteaux.)

Dans la langue moderne, contribuer est un verbe transitif indirect; on ne contribue pas quelque chose, mais à quelque chose :

Ce film a contribué à le faire connaître. (Petit Robert.)

Contribuer à la défaite du parti adverse. (Berthier-Colignon.)

Cette voix, coupante et blanche à la fois, qui contribuait à la rendre antipathique. (Gyp, dans le Trésor de la langue française informatisé.)

Ces personnes contribueront à l'enrichissement des collections de la bibliothèque par un don (et non *contribueront un don pour...). (D'après le Multidictionnaire.)

Le gouvernement va contribuer pour deux millions au projet (et non *va contribuer deux millions au projet). (Chouinard.)

Je contribuerai pour mille dollars à cette entreprise.
J'y contribuerai jusqu'à concurrence de mille dollars.
(Dagenais.)

Jusqu'au XVIIe siècle, toutefois, contribuer pouvait s'employer avec un complément d'objet direct :

Le roi contribuera à cette armée douze mille hommes. (Malherbe, dans le Lexis.)

Cette construction, aujourd'hui rare selon Thomas, est condamnée par les ouvrages québécois que j'ai consultés, soit le Multidictionnaire, le Chouinard, le Colpron et le Dagenais; il semble que sa fréquence d'emploi au Canada soit attribuable à l'influence de l'anglais to contribute, qui peut s'utiliser avec un complément d'objet direct :

To contribute stories to a magazine. (Random House Webster's Unabridged Dictionary.)

Dans la phrase à l'étude, on aurait pu écrire :

... les États-Unis ne peuvent fournir plus que les 15 000 hommes...

Line Gingras
Québec

« Le piège » : http://www.ledevoir.com/2007/04/11/138955.html

23 avril 2007

L'antécédent du pronom relatif

Antécédent du pronom relatif; place de l'antécédent du pronom relatif; grammaire française; syntaxe du français.

« "Au fond, le PQ devrait revenir aux idées de René Lévesque", conclut Robert Comeau qui était à la fois un Québécois enraciné et un nationaliste. » (Antoine Robitaille.)

Au premier abord, il semble que la proposition relative s'applique à l'historien Robert Comeau, alors que le pronom qui représente en fait René Lévesque. On réglerait le problème en rapprochant le pronom de son antécédent :

« Au fond, conclut Robert Comeau, le PQ devrait revenir aux idées de René Lévesque », qui était à la fois un Québécois enraciné et un nationaliste.

Line Gingras
Québec

« L'entrevue - Revenir à Lévesque » : http://www.ledevoir.com/2007/04/23/140593.html?fe=836&...

22 avril 2007

Au début de campagne

Au début de campagne; au début de la campagne; en début de campagne; grammaire française; syntaxe du français.

« En jouant finement sa partie, Bayrou se retrouve aujourd'hui dans une position de force qui contraste passablement avec celle qui était la sienne au début de campagne. » (Serge Truffaut.)

D'après ce que je vois dans le Petit Robert, le Multidictionnaire, le Hanse-Blampain et le Trésor de la langue française informatisé, on écrit en début de campagne, mais au début de la campagne :

En début de semaine. Au début du siècle. (Petit Robert.)

En début de journée, au début de la journée. (Multidictionnaire.)

En début de séance, au début de la semaine. (Hanse-Blampain.)

Tout au début de l'affaire. (Trésor de la langue française informatisé.)

Une très vieille baraque sise au bas du quartier latin, au début de la rue suivie jadis par les pèlerins de Compostelle. (Duhamel, dans le Trésor.)

De fait, expliquent Hanse et Blampain, « [le] complément de au début est précédé de l'article (ou d'un autre déterminant), à moins que ce complément ne soit un nom de mois ou d'année » :

Au début de la journée, de l'année, de l'hiver, de son mandat, de cette période, mais au début d'octobre, de 1998.

Line Gingras
Québec

« Chapeau! » : http://www.ledevoir.com/2007/04/21/140353.html

18 avril 2007

L'épave ou ses morceaux?

« L'épave de l'avion présidentiel, abattu par deux missiles le 6 avril 1994 aux alentours de 20 h, gisent dans le jardin : un moteur ici, une aile un peu plus loin. » (Libération.)

Ce ne sont pas les missiles qui gisent dans le jardin. On y voit un moteur, une aile, d'autres morceaux sans doute, qui appartiennent à l'épave, sujet grammatical : L'épave gît dans le jardin.

Line Gingras
Québec

« Treize ans après le génocide - Le Rwanda mise maintenant sur le tourisme » : http://www.ledevoir.com/2007/04/07/138640.html

17 avril 2007

Armes de destruction massives

« ... Cheney et ses acolytes se sont livrés à une intimidation de type mafieux contre les chercheurs de la CIA et d'autres agences qui disaient "Mais monsieur, nous ne trouvons rien sur les armes de destruction massives!"... » (François Brousseau.)

À mon avis, c'est la destruction qui est massive; je trouve d'ailleurs dans le Petit Robert, à l'article « destruction » :  Armes de destruction massive.

« Et qui, en outre, connaissait mieux que les plus hauts gradés - lui qui n'avait jamais revêtu l'uniforme - toutes les arcanes de la stratégie moderne... »

D'après le Petit Robert, le Multidictionnaire, le Lexis et le Hanse-Blampain, le nom arcane, qui s'emploie généralement au pluriel, est toujours masculin. Le Trésor de la langue française informatisé signale que le féminin est rare.

« Le même homme, durant la même période, fut soupçonné de multiples conflits d'intérêts impliquant le Pentagone et ses politiques d'achats, des compagnies d'armements israéliennes et américaines qu'il dirigeait ou avait dirigé. »

Le participe passé employé avec l'auxiliaire avoir, il ne semble pas superflu de le rappeler, s'accorde avec le complément d'objet direct, si celui-ci précède le verbe. Il avait dirigé quoi? des compagnies : des compagnies qu'il avait dirigées.

« ... l'homme qui, en sa qualité de président du Conseil d'expert en défense formé autour du président Bush... »

Un conseil doit bien avoir d'autres membres que son président?

Line Gingras
Québec

« À bas les pourris » : http://www.ledevoir.com/2007/04/16/139615.html

16 avril 2007

Peut-être ou peut être

« Son buste provient de l'atelier du grand artiste Thoutmès, et peut-être son œuvre personnelle. » (AFP.)

Comment savoir si l'on a affaire à l'adverbe peut-être ou aux verbes pouvoir et être? On peut remplacer peut-être par sans doute; et peut être par pourrait être.

« "... Mais un long voyage de Néfertiti suscite, du point de vue des professionnels, des inquiétudes quant à la conservation et _ la restauration [de l'œuvre] qui doivent être pris au sérieux", a ajouté le ministre. »

Ce sont les inquiétudes qui doivent être prises au sérieux. Par ailleurs, on répète d'ordinaire les prépositions à, de et en devant chacun des compléments : ... suscite [...] des inquiétudes quant à la conservation et à la restauration...

Line Gingras
Québec

« Musées - L'Égypte et l'Allemagne se disputent le buste de Néfertiti » : http://www.ledevoir.com/2007/04/16/139602.html?fe=778&...

15 avril 2007

Autant que faire ce peut

Autant que faire ce peut; autant que faire se peut; homonymes; grammaire; syntaxe; orthographe.

« Autant que faire ce peut, les cégeps et les universités devraient également aider les étudiants à se diriger dans les secteurs où les besoins sont les plus grands. » (Éric Desrosiers.)

On en trouve confirmation dans le Petit Robert (à l'article « pouvoir »), le Multidictionnaire (à l'article « faire ») et le Hanse-Blampain (à l'article « autant »), l'expression soulignée s'écrit autant que faire se peut : il s'agit du pronominal impersonnel il se peut - autant qu'il se peut faire.

Line Gingras
Québec

« Au diable la dette, place à l'innovation » : http://www.ledevoir.com/2007/04/13/139273.html?fe=760&...

14 avril 2007

Résulter en

Résulter ento result in; anglicisme; calque de structure; grammaire française; syntaxe du français.

« Leur objectif, voire leur ambition première, est de poser une série de gestes pouvant résulter en une réduction des troupes anglo-américaines disséminées au Moyen-Orient. » (Serge Truffaut.)

D'après ce que je vois dans les dictionnaires généraux, résulter ne veut pas dire « avoir pour conséquence », « avoir pour effet », « avoir pour résultat », mais être la conséquence, l'effet, le résultat de quelque chose. Ce verbe a donc pour sujet ou bien le résultat dont il s'agit, ou bien le pronom impersonnel il :

Cet échec résulte d'une insuffisance d'étude et d'exercices. (Multidictionnaire.)

Son état de santé résulte d'un excès de travail. (Lexis.)

L'amitié résulte d'un faible degré d'opposition entre des êtres individuellement divers. (Senancour, dans le Petit Robert.)

La vision réaliste de Manet n'a jamais admis la poétisation volontaire, hormis celle qui résulte des couleurs elles-mêmes. (Mauclair, dans le Trésor de la langue française informatisé.)

Que résulterait-il de toutes ces démarches? (Lexis.)

Il ne peut rien en résulter de bon. (Petit Robert.)

Il en est résulté des rixes autour des urnes. (Giraudoux, dans le Hanse-Blampain.)

Trois des quatre ouvrages québécois que j'ai consultés, soit le Multidictionnaire, le Chouinard et le Colpron (le Dagenais n'aborde pas la question), signalent comme incorrecte la construction résulter en, calque de l'anglais to result in :

Sa déclaration a provoqué (et non *a résulté en) une abondante correspondance. (Multidictionnaire.)

Divers équivalents sont possibles selon le contexte, par exemple causer, entraîner, produire, se solder par. On trouvera d'excellentes suggestions dans le Meertens.

Le passage à l'étude aurait pu se lire :

... poser une série de gestes pouvant entraîner une réduction des troupes...

Line Gingras
Québec

« Un coup de dés » : http://www.ledevoir.com/2007/04/10/138844.html 

13 avril 2007

Se féliciter que + indicatif

Se féliciter que + subjonctif; se féliciter que + indicatif; choix du mode après se féliciter que; grammaire française; syntaxe du français.

« Tony Clement était pourtant fier de défendre ses résultats, se félicitant qu'à l'échelle du pays l'ensemble des cinq secteurs prioritaires sont couverts. » (Hélène Buzzetti.)

D'après le Multidictionnaire et le Hanse-Blampain, on peut se féliciter d'avoir fait quelque chose :

Tu te félicites d'avoir pris ton parapluie, car il pleut à torrents. (Multidictionnaire.)

Félicitez-vous d'avoir été épargné. (Lexis.)

Babeuf se félicite d'avoir défendu la révolution et la république. (Jaurès, dans le Trésor de la langue française informatisé.)

Je trouve aussi, dans le Lexis et le Trésor, la construction se féliciter que + subjonctif :

Le père se félicitait que le bachot eût éloigné son cadet de Sérianne. (Aragon, dans le Trésor.)

Il se félicitait que le diable portât pierre à l'édifice chrétien de Claquebue. (Aymé, dans le Lexis.)

Aucun des dix ouvrages consultés ne reçoit se féliciter que suivi d'un indicatif. À mon avis, comme se féliciter exprime un sentiment, le subjonctif est le mode qui convient dans la phrase à l'étude :

Tony Clement était pourtant fier de défendre ses résultats, se félicitant qu'à l'échelle du pays l'ensemble des cinq secteurs prioritaires soient couverts.

Line Gingras
Québec

« Harper tient une promesse... diluée » : http://www.ledevoir.com/2007/04/05/138332.html

12 avril 2007

Une témoin à la mémoire vascillante

Une témoin, la témoin; genre du nom témoin; témoin au féminin; accord par syllepse; grammaire française; syntaxe du français; orthographe.

« Une témoin à la mémoire vascillante » (titre d'un article de Brian Myles).

À cinq reprises dans le corps de son article, monsieur Myles emploie le nom témoin - chaque fois en parlant d'une femme, et chaque fois au masculin. Il aurait fallu en tenir compte dans l'établissement du titre, d'autant plus que témoin, d'après le Petit Robert (2007), le Hanse-Blampain et même le Multidictionnaire (quatrième édition), est seulement de genre masculin :

Cette femme a été le témoin de la défense. (Hanse-Blampain.)
Elle a été le témoin involontaire de cette scène. (Multidictionnaire.)

« La veille, le témoin C-17 avait déclaré que Désiré Munyaneza l'avait violée à quatre reprises au cours du génocide... »

L'accord par syllepse, c'est-à-dire selon le sens, a paru préférable, ici, à l'accord grammatical. Il crée cependant un certain malaise, ce qu'on aurait pu éviter en remplaçant le témoin C-17 par un terme féminin désignant la même personne : le journaliste utilise déjà survivante (du génocide rwandais) et jeune femme...

Line Gingras
Québec

« Procès pour crime de guerre, crime contre l'humanité et génocide - Une témoin à la mémoire vascillante » [sic] : http://www.ledevoir.com/2007/04/12/139105.html

09 avril 2007

Les éléments modulants l'acoustique

Modulant, participe présent ou adjectif verbal; grammaire française; syntaxe du français; orthographe d'accord.

« Lorsqu'on lui demande si la simplicité des éléments modulants l'acoustique à Québec est une réponse à la surenchère des gadgets acoustiques d'autres salles... » (Christophe Huss.)

Modulants serait correctement accordé s'il était adjectif verbal; mais c'est un participe présent, comme le montre la présence d'un complément d'objet direct, l'acoustique. Il doit par conséquent demeurer invariable.

Vous en doutez? Remplaçons éléments par un nom féminin, qui obligerait à prononcer modulantes, si nous avions affaire à un adjectif : dirait-on les parties modulantes l'acoustique, les composantes modulantes l'acoustique?

C.Q.F.D.

Line Gingras
Québec

« Musique classique - Dans les coulisses d'une nouvelle salle de concert » : http://www.ledevoir.com/2007/03/31/137650.html

08 avril 2007

Ceux qu'il y a eus...

Il y a eu; accord du participe passé du verbe impersonnel; accord du participe passé du verbe avoir, employé à la forme impersonnelle; grammaire française; orthographe d'accord.

« Candidat-vedette du PLQ dans Lac-Saint-Jean, Yves Bolduc croit que sa région a fait preuve d'ingratitude à l'endroit du gouvernement : "La population n'a pas su reconnaître [le travail de] M. Charest, tous les investissements qu'il y a eu au Saguenay-Lac-Saint-Jean..." » (Antoine Robitaille et Isabelle Porter.)

En lisant ce passage l'autre jour, j'ai tout de suite conclu qu'on avait été distrait : le participe passé employé avec l'auxiliaire avoir ne doit-il pas s'accorder avec le complément d'objet direct, si ce complément précède le verbe? Il y a eu quoi... des investissements, non?

J'avais négligé un détail : nous n'avons pas affaire ici à un participe passé « ordinaire », mais au participe passé d'un verbe employé à la forme impersonnelle. Et comme vous vous en doutez bien, une règle particulière s'applique : je lis en effet, dans le Nouveau dictionnaire des difficultés du français moderne de Hanse et Blampain, au point 3 de l'article sur l'accord du participe passé (page 417 de la quatrième édition), que le « participe passé des verbes impersonnels ou pris impersonnellement » est « toujours invariable, quel que soit l'auxiliaire » :

Les orages qu'il y a eu.

J'inaugure donc une nouvelle rubrique : Cultiver le doute. Car le doute est salutaire - et c'est Pâques aujourd'hui.

Line Gingras
Québec

« Les partis s'ajustent au "tsunami" adéquiste » : http://www.ledevoir.com/2007/03/30/137537.html

07 avril 2007

Un peu d'analyse

Infinitif ou participe passé; analyse logique; grammaire française; syntaxe du français; orthographe.

« Aujourd'hui divisé, le camp des démocrates a l'obligation de reprendre les choses là où il les a laissées il y a deux ans. Autrement dit, chacun d'entre eux se doit de mettre en sourdine ses accès de vanité pour mieux recomposer le front uni qu'ils avaient présenté à l'hiver 2004 et redonné espoir à une vaste majorité d'Ukrainiens. » (Serge Truffaut.)

Redonné, participe passé, se rattache à l'auxiliaire avoir, avec lequel il forme un plus-que-parfait de l'indicatif : ... le front uni qu'ils avaient [...] redonné espoir... Seulement, vous l'avez remarqué, cet énoncé n'a pas de sens. Ce qu'on a voulu dire, en fait, c'est que les démocrates doivent mettre en sourdine leurs accès de vanité pour mieux recomposer un front uni et pour redonner espoir à une vaste majorité d'Ukrainiens. Bien entendu, il n'est pas nécessaire de répéter la préposition; mais il faut montrer que c'est à elle que se rattache l'idée de redonner espoir - cela impose, évidemment, de mettre le verbe à l'infinitif.

Line Gingras
Québec

« L'orange pressée » : http://www.ledevoir.com/2007/04/04/138165.html

06 avril 2007

Ils se sont partagés le vote

Se partager quelque chose; accord du participe passé du verbe pronominal se partager; grammaire française; syntaxe du français; orthographe d'accord.

« ADQ et PQ se sont partagés le vote dans les régions du Québec. » (Pierre Duhamel.)

Lorsque le verbe pronominal a un complément d'objet direct, le participe passé s'accorde toujours avec ce complément, pourvu qu'il soit placé devant le verbe :

Ils se sont partagé l'héritage, les tableaux, les actions. (Chardonne, dans le Petit Robert.)

Ils se sont partagé les profits. (Multidictionnaire.)

Ils se sont partagé la responsabilité. (Hanse-Blampain.)

Les bénévoles n'ont pas eu de mal à accomplir les tâches qu'ils s'étaient partagées.

L'ADQ et le PQ ne se sont pas partagés eux-mêmes; ils ont partagé le vote entre eux :

ADQ et PQ se sont partagé le vote dans les régions du Québec.

Line Gingras
Québec

« Le Québec qui souffre vs le Québec qui paye » : http://forums.lactualite.com/advansis/?mod=for&act=di... 

04 avril 2007

Un baudruche promotionnel

Un ou une baudruche; un baudruche; une baudruche; genre du nom baudruche; accord du participe passé employé avec avoir; grammaire française; syntaxe du français; orthographe d'accord.

« ... tout ça sentirait un peu trop la stratégie de mise en marché [...] le baudruche promotionnel menaçant d'éclater. Si c'était quelqu'un d'autre. » (Sylvain Cormier.)

D'après le Multidictionnaire, le Petit Robert, le Lexis et le Trésor de la langue française informatisé, baudruche est un nom féminin :

Théodule [...] passait sa vie à boire de la bière qui lui avait donné, à force de le gonfler et de le souffler, l'apparence comique et inquiétante d'une baudruche. (E. et J. de Goncourt, dans le Trésor.)

L'affaire s'est dégonflée comme une baudruche. (Petit Robert.)

Crever une baudruche (= dissiper les illusions). (Lexis.)

Ils lèvent leurs verres, ils trinquent à toutes sortes de grandes baudruches, mais tout de même à la paix, à la vie. (Aragon, dans le Trésor.)

* * * * *

« Fallait recevoir au plexus et dans les oreilles l'acclamation monstre qu'a servi_ à Bélanger ce public plus qu'heureux... »

Le participe passé employé avec avoir s'accorde en genre et en nombre avec le complément d'objet direct, si celui-ci précède le verbe. Et qu'est-ce ou qui est-ce qui a servi qui ou quoi, dans la phrase à l'étude? Si vous me dites que c'est l'acclamation qui a servi le public, je vous envoie réfléchir dans le coin, et vous serez privé de poutine - en fait c'est le public, ce public plus qu'heureux, qui a servi... quoi? une acclamation monstre (au chanteur Daniel Bélanger). Il fallait donc écrire, sans se laisser induire en erreur par l'inversion du sujet :

... l'acclamation monstre qu'a servie à Bélanger ce public plus qu'heureux...

Line Gingras
Québec

« Spectacle gratuit de Daniel Bélanger au Métropolis - Merci d'être là, et réciproquement » : http://www.ledevoir.com/2007/04/03/138082.html

02 avril 2007

Il est normal que, il est juste que + indicatif

Il est juste que + indicatif ou subjonctif; il est normal que + indicatif ou subjonctif; choix du mode; voit ou voie; grammaire française; syntaxe du français.

« Comme s'il était normal et juste que le garçon qui attendait patiemment son tour pour jouer dans le grand club se voit donner l'occasion de démontrer enfin ses talents. » (Gil Courtemanche.)

Le Trésor de la langue française informatisé, aux articles « normal » et « juste », signale que les tours il est normal que et il est juste que sont suivis du subjonctif :

Comme le fait fut observé par des généticiens, il était normal qu'il fût interprété en terme génétique. (P. Morand.)

C'est le chat qui pense et qui agit, et il n'est que juste que ce chat soit, comme la chienne Pouffe, un être céleste. (France.)

Selon Wagner et Pinchon, on se sert du subjonctif « toutes les fois que dans un énoncé la prise en considération d'un fait, l'interprétation d'un fait l'emportent sur l'actualisation de ce fait ». Il me paraît imprudent de généraliser, mais je dirais que le subjonctif convient très souvent à l'expression d'un jugement, d'un sentiment, d'une volonté :

Il est utile que vous le fassiez le plus tôt possible. (Grevisse.)

Dans la phrase à l'étude, on a employé le présent de l'indicatif, voit, au lieu du présent du subjonctif, voie; il suffit de remplacer le verbe voir par le verbe avoir, qui ne se prononce pas de la même façon aux deux modes, pour se rendre compte que le subjonctif s'imposait :

Comme s'il était normal et juste que le garçon qui attendait patiemment son tour pour jouer dans le grand club ait l'occasion de démontrer enfin ses talents.

Line Gingras
Québec

« Jetables et remplaçables » : http://www.ledevoir.com/2007/03/31/137695.html